« Pern aux aguets surveille les cieux »

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○ Chose promise, chose due ! ○ M'étais-je soudain exclamée en débarquant dans les Cavernes Inférieures, ayant rapidement repéré du regard un certain Candidat. C'était l'heure de se rendre aux Pierres de l'Etoile, depuis le temps que j'avais promis à Lÿonel de l'y emmener sur le dos de Taleith. Maintenant que j'avais un moment de libre et que le soleil de cette fin d'après-midi luisait encore suffisamment pour nous laisser également profiter de l'époustouflant panorama, il fallait sauter sur l'occasion.

Lorsque nous la rejoignîmes au dehors, ma Verte était toute joyeuse, gazouillant gaiement à l'approche du gamin pour le saluer avec douceur. Elle l'appréciait autant que moi et n'hésitait pas à lui montrer, tout en ne perdant pas une occasion de se faire dorloter si Lÿonel acceptait de le lui caresser le tour de l'œil.

Tout en aidant le garçon à s'installer, ayant eu la présence d'esprit de prévoir l'équipement pour transporter un passager sans danger, j'y allais de mon petit commentaire, demandant nouvelles et informations sur la journée qui venait de passer. ○ Alors, comment va ? Tu as hérité de quelles corvées, aujourd'hui ? Rien de trop pénible ou fatiguant ? Tu es quand même suffisamment en forme pour aller à aux Pierres de l'Etoile ? T'as mangé un bout avant de venir ou tu veux une racine ? ○ Demandais-je, ayant chipé de quoi grignoter au cas où. ○ Tu vas vite. ○ Nota Taleith, indiquant par sa candeur et son naturel que j'assommais Lÿonel de questions. UU J'étais bavarde et l'excitation attenante à la simple idée de m'élever vers le promontoire le plus célèbre du Weyr me rendait encore plus énergique qu'à l'accoutumée.

Je me contentai de sourire à sa réflexion et de lui flatter l'encolure avant de moi-même prendre place sur le dos de ma dragonne. Une fois certaine que nous étions bien arnachés, je priai Taleith de décoller et son envol gracieux me remplit les poumons d'une bouffée d'oxygène et d'allégresse. Il ne nous fallut pas longtemps avant d'atteindre notre objectif et je saluai le Chevalier de garde, laissant Lÿonel s'imprégner du lieu autant que moi avant de m'autoriser à rompre le silence.

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**♣ Date de naissance :** 01/05/1245

J'avais trépigné d'impatience toute la journée. Au point presque d'en oublier de manger, malgré le soleil encore haut, comme on me l'avait conseillé. Je me savait encore tout nouveau au Weyr, et pourtant, une Dame m'avait proposé de m'emmener aux Pierres de l'Etoile, l'un des lieux les plus importants de mon nouveau monde, car c'est de là que partirait l'alarme de la guerre contre les Fils.

Que Shoneah soit celle qui me l'avait offert m'avait fait chaud au coeur. J'appréciais cette Dame, et respectait sa Dragonne. Le fait qu'elle puisse changer si complètement d'attitude me surprenait, mais me la rendait plus accessible, comme si je la comprenait mieux, comme si elle me montrait que je n'étais pas le seul à voir que le monde avait deux facettes.

J'avais accompli mes tâches avec plus de sérieux encore qu'à l'habitude, tant je voulais être sûr de mériter l'attention qu'on me portait. Il n'était pas facile d'être le plus jeune des candidats à l'éclosion, je voyais bien que les Chevaliers m'observaient, et certains avec plus d'attention que pour les autres candidats. Je me doutais bien que l'accès aux Sables d'Eclosion me serait refusé pour un long moment, à moins que je ne fasse mes preuves, de manière indiscutable. Et l'excellence dans mes corvées était la première preuve que je puisse donner, le premier pas vers les Sables.

Lorsque Shoneah se posa près de moi, j'étais prêt. J'avais pris le manteau qu'on m'avait donné lors de mon arrivée, me doutant bien que même si nous ne volerions pas très haut, la nuit risquait d'être fraiche sur le Promontoire.
J'avais fait un pas vers Taleith avant de m'arrêter bien vite au bruit qu'elle produisit, ne sachant comment l'interpréter, préférant attendre l'invite de la Dame à continuer mon approche. Leur paire m'impressionnait toujours autant, et il allait falloir bien des rencontres avant que je me sente plus à l'aise avec elles.
Lorsqu'elle fît un geste de la main vers moi, puis vers la tête de la Dragonne, je me remis en mouvement, et arrivé enfin près de sa tête, je levais une main timide ...

Je ... je peux ?

Une fois l'autorisation obtenue, et suivi les conseils de la Dame près de moi, je commençait à caresser, à gratouiller Taleith, en insistant, à leur demande, sur le tour des yeux, pendant que Shoneah nous installait et nous harnachait.

Ho, ça va très ... hé bien, j'ai du trier ... non non, je ne suis pas fa ... bien sûr, je peux tenir toute ... oui, j'ai pu manger avant de partir.

Je m'arrêtais, un peu essoufflé par la rafale de questions auxquelles je n'avais même pas eu le temps de répondre complètement.

Puis vînt le moment du décollage, cette sensation si particulière que je n'avait encore jamais ressentie, étant venu au Weyr par la route, et je m'abimais dans cette extase, qui ne dura pas assez à mon goût. Le retour au sol, le contact avec la pierre me parut alors étrange, comme si on venait de m'arracher mes propres ailes, et c'est un peu déstabilisé que je saluais dans les formes le Chevalier de garde.

Finissant le tour de la Dragonne, en l'effleurant du bout des doigts, je découvrait enfin le panorama qu'on m'avait vanté, la vue imprenable sur la plaine d'Ista, les vastes terres de mon enfance, et la vue de la lointaine route de poussière que j'avais arpenté me rappela ma mère. Et c'est les larmes aux yeux, dans un souffle qui était presque un sanglot, que je fît le seul commentaire dont j'étais capable :

Waouh !

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D'un naturel franc et sociable, le fait que le contact soit rapidement bien passé avec Lÿonel me rendait assez familière avec lui, comme si je l'avais toujours connu. Dans les relations, avec moi, c'était souvent blanc ou noir, rarement gris, je devais le reconnaître. Dès que j'avais un a priori positif, je creusais pour approfondir le lien et solidifier les bonnes bases. Ca m'avait jusqu'alors plutôt bien réussi et j'en étais heureuse.

Une fois Lÿonel repéré et prié, avec enthousiasme, de me suivre, je vérifiai que ma tenue de vol était bien fermée et les racines sagement dans ma besace tandis que nous effectuons le chemin nous séparant de Taleith. Taleith, qui, heureuse, accueillait l'enfant avec des gazouillements ravis. ○ Je ... je peux ? ○ Bien sûr que tu peux, elle n'attend que ça ! ○ L'encourageais-je, vérifiant qu'il osait bien la toucher sans mon aide, sinon je lui aurais pris la main pour la rapprocher du museau de ma Verte. ○ N'hésite pas à lui frotter le contour de l'œil, elle adoooore ça. D'ailleurs, tu peux l'entendre au bruit qu'elle fait, là. ○ Souris-je, ma dragonne ronronnant de plaisir tandis que Lÿonel la dorlotait.

Notre boule de cuir aux anges, je pus ensuite passer à la deuxième étape : l'harnachement. J'en profitai alors pour questionner le Candidat sur sur sa fatigue, ses corvées, sa faim, bref, sur sa journée et sa condition physique pour partir s'émerveiller avec moi sur les Pierres de l'Etoile. ○ Ho, ça va très ... hé bien, j'ai du trier ... non non, je ne suis pas fa ... bien sûr, je peux tenir toute ... oui, j'ai pu manger avant de partir. ○ Parfait ! Au pire, j'ai quand même des racines avec moi. Et trier quoi, tu disais ? ○ Poursuivis-je comme si la conversation était parfaitement normale et que je ne l'avais jamais dotée d'un tempo particulier en bonne empressée que j'étais.

Lorsque nous fûmes tous prêts, Taleith décolla et nous transporta jusqu'au promontoire d'où nous pourrions apprécier la beauté et la symbolique des lieux. ○ Waouh ! ○ Ca a de la classe, hein ? « Pern aux aguets surveille les cieux, et guette la pierre de l'Étoile ». ○ Citais-je avec déférence avant de me tourner vers le garçon et remarquer les larmes qui avaient perlé au coin de ses yeux. ○ Ca va ? Tu as le vertige ? ○ Ce que je n'espérais pas, ça ne serait guère pratique pour un futur Chevalier.

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**♣ Date de naissance :** 01/05/1245

La vue était époustouflante, et le coucher de soleil nimbait la plaine d'or et de feu. Je n'avais jamais rien vu de pareil, depuis le sol, n'ayant jamais eu l'occasion de profiter de points de vue en altitude auparavant.
La beauté du site, la violence des couleurs, l'éloignement d'avec la poussière de la route et la boue des berges de la rivière rendaient la scène incomparable, digne d'un tableau, qui mériterait les plus précieux des pigments.

Captivé, autant par la puissance de l'endroit que par celle des souvenirs de mon enfance vagabonde, que j'estimais maintenant révolue, je n'avais qu'à peine suivi le badinage de la Dame qui m'avais mené jusqu'ici ...

Des racines ? Non, non, j'ai du trier des fruits, séparer les trop murs de ceux qui pouvaient se garder, je m'en suis mis partout, une horreur ...

La citation me fit me retourner, je me doutais que c'était important, et pourtant, il me semblait bien que nul n'en avait encore fait mention devant moi.

Excusez moi, Dame, mais cette phrase ? On dirait une citation d'un récit, quelque chose de crucial, mais comme je suis tout nouveau, je ne sais pas de quoi il s'agit. Ma mère m'a élevé toute seule, et je n'ai que rarement rencontré les harpistes, alors ...

Je me préparais à observer de nouveau la plaine, même si la citation de Dame Shoneah m'incitait plutôt à lever les yeux vers le ciel, me demandant bien ce que le crépuscule était censé y faire apparaitre, quand je me rendis compte qu'elle avait dû percevoir mes émotions à la vue de la plaine.

Ho, non, pas de vertige, ça va ... c'est juste que la vue de la route, là-bas, me rappelle ma mère. J'ai toujours vécu avec elle, seul, dans la roulotte, jusqu'à ce qu'elle ... Mais c'est fini, je suis tout seul maintenant, un orphelin sans père, il est mort lui aussi, m'a t'elle dit un jour, mort bien avant ma naissance.

Je poussait alors un grand soupir, pour refouler les sanglots qui menaçaient : je n'étais plus un enfant, je devais être fort et faire mes preuves, j'allais devenir un Candidat, et plus tard un Grand Chevalier, et ma mère serait fière de moi, maintenant qu'elle avait rejoint mon père, et lui aussi serait fier de son fils qui suivait ses traces !

Mais je ne suis pas ici pour me lamenter, ni vous pour me consoler, nous sommes ici pour que j'apprenne ce que sont les devoir des Chevaliers et de leurs Dragons ! Alors contez moi, Madame, s'il vous plait, le récit de la Pierre de l'Etoile.

Je m'étais rapproché de la Dragonne, lui gratouillant les paupières et le museau, attendant la leçon qui me rapprocherait du statut que je visais.

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La vue était magnifique, c’était une certitude. Dommage que j’ai un peu perdu l’habitude de profiter de la splendeur des lieux, trop concentrée sur mon idée fixe de voir une lueur rouge se matérialiser dans le ciel pernais. Enfin, ça n’était pas pour aujourd’hui, peut-être demain, alors, en attendant, j’avais Lÿonel avec moi et beaucoup de choses à lui raconter. ○ Des racines ? Non, non, j'ai dû trier des fruits, séparer les trop mûrs de ceux qui pouvaient se garder, je m'en suis mis partout, une horreur ... ○ Yeark, je te plains ! Tu as eu le temps de te débarbouiller un peu ? Ca ne doit pas être génial d’être tout collant. Mais je disais que j’avais des racines avec moi, au cas où tu aurais faim. ○ Débitais-je. Oh, oui, je passais parfois du coq à l’âne, il faudrait qu’il s’y habitue. u.u

D’ailleurs, une fois sa réponse obtenue et le sujet « nourriture » épuisé, je bifurquai sur le thème central de cette fin d’après-midi : les Pierres de l’Etoile. Et quoi de mieux qu’illustrer par la citation d’une Ballade ? ○ Excusez moi, Dame, mais cette phrase ? On dirait une citation d'un récit, quelque chose de crucial, mais comme je suis tout nouveau, je ne sais pas de quoi il s'agit. Ma mère m'a élevé toute seule, et je n'ai que rarement rencontré les harpistes, alors … ○ C’est un morceau d’une Ballade. « Fument les mers et tremblent les monts, fondent les sables et prouvent les dragons quand l'Étoile Rouge passe. Croulent les murs et brûlent les feux, meurent les plantes à l'heure où dans les passes Pern aux aguets surveille les cieux, et guette la pierre de l'Étoile. Les Weyrs sont en alarme, les chevaliers dressent leurs armes, quand passe la Rouge Étoile. » ○ Entonnais-je, non sans penser moi-même à ma mère. C’est avec elle que j’avais appris les bases et je lui devais mon sens du rythme, ma foi envers les Weyrs et mon amour des Ballades. Mais je devais également beaucoup à mon oncle, comme Lÿonel prochainement. ○ Bientôt, Maître Damhàn t’aura appris tout ça. Il est gentil, n’est-ce pas ? ○ Fis-je et on pouvait clairement lire dans mon regard l’affection que je lui portais.

Je jetai un œil autour de moi puis au garçon qui semblait troublé par quelque chose mais je ne parvenais pas à mettre le doigt sur quoi sans lui poser directement la question. ○ Ho, non, pas de vertige, ça va ... c'est juste que la vue de la route, là-bas, me rappelle ma mère. J'ai toujours vécu avec elle, seul, dans la roulotte, jusqu'à ce qu'elle ... Mais c'est fini, je suis tout seul maintenant, un orphelin sans père, il est mort lui aussi, m'a-t-elle dit un jour, mort bien avant ma naissance. ○ Bien joué, Shoneah, tu as mis en plein dans le mille … Je me sentais idiote, la grande gourde curieuse et gaffeuse arrivant avec ses gros sabots pour piétiner la bonne humeur d’un enfant. Ah vraiment, j’en avais de la classe, sur le coup … Je me penchai alors pour me mettre à sa hauteur et passer un bras autour de ses épaules. ○ Ca ne remplace pas les gens mais sache que tu ne seras jamais seul au Weyr. ○ Assurais-je d’une voix la plus douce possible pour moi – oui, de temps en temps, ça arrivait – avant que Taleith n’appuie mes propos d’un roucoulement apaisant.

Ca pouvait paraître idiot mais, à mes yeux, un Weyr formait une grande famille qui devait se serrer les coudes. Oh, certes, j’avais mes parents, qui occupaient une place à part dans mon cœur, et mes amis les plus proches, comme S’ras et Lessar, qui étaient comme des frères, pour moi, mais ça ne m’empêchait pas de considérer les gens d’ici comme une famille à part entière. Ok, il y avait des têtes à claques comme Sequaloris dans le lot mais l’entente dans une fratrie n’était pas toujours parfaite, non ?

Lÿonel me tira de mes réflexions et je me redressai, ôtant mon bras de ses épaules non sans avoir pressé légèrement celle sur laquelle ma main reposait. ○ Mais je ne suis pas ici pour me lamenter, ni vous pour me consoler, nous sommes ici pour que j'apprenne ce que sont les devoir des Chevaliers et de leurs Dragons ! Alors contez moi, Madame, s'il vous plait, le récit de la Pierre de l'Etoile. ○ Alors, commençons par le commencement en voyant un peu ce que toi tu penses depuis que tu es au Weyr et puis je te donnerai ma version. Donc, pour toi, quelle est la mission première des Chevaliers, des Dames et des Dragons ? ○ Commençais-je, un large sourire aux lèvres l’encourageant à dire ce qu’il savait, pensait, croyait ou avait simplement entendu ou appris depuis son arrivée ici. ○ Et tu peux m’appeler Shoneah, tu sais. ○ Précisais-je, bienveillante. Bon, d’accord, j’étais Dame, mais je n’étais pas assez … guindée que pour exiger qu’on utilise mon titre tout le temps. Le protocole, c’était bon pour les cérémonies. UU

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**♣ Date de naissance :** 01/05/1245

Après avoir pris la peine de rassurer la Dame Verte sur le temps dont j'avais disposé pour procéder à des ablutions post-corvée et manger un peu avant notre rendez-vous, j'avais posé la question sur l'origine de la citation et sa réponse m'avait transporté.

○ C’est un morceau d’une Ballade. « Fument les mers et tremblent les monts, fondent les sables et prouvent les dragons quand l'Étoile Rouge passe. Croulent les murs et brûlent les feux, meurent les plantes à l'heure où dans les passes Pern aux aguets surveille les cieux, et guette la pierre de l'Étoile. Les Weyrs sont en alarme, les chevaliers dressent leurs armes, quand passe la Rouge Étoile. » ○

Le rythme de sa voix, le ton qu'elle employait pour citer la ballade, tout entrait en jeu pour rendre la citation envoutante, a tel point que je me surpris à répéter le texte en moi-même, me contentant de former les mots avec mes lèvres, pour me pénétrer de la rythmique de la stance, pour goûter à la force des mots, et pour mémoriser le fragment de ballade, si je le pouvais ...
Je ... je ne comprends pas tout avouais-je, un peu honteux.
Comme si la Dame avait prévu mes dires, elle reprit aussitôt :
○Bientôt, Maître Damhàn t’aura appris tout ça. Il est gentil, n’est-ce pas ?○
Je la regardais, un peu surpris, tant il semblait qu'elle appréçiait l'homme dont elle venait de citer le nom, qu'il me semblait bien avoir déjà entendu. Etait-ce un membre de sa famille ? Ou bien son petit ami (même si je ne voyais que vaguement ce que pouvait bien être un petit ami) ?
Maître Damhàn, dites vous ? C'est ... ha oui, le harpiste ? Pardon, le Maître Harpiste du Weyr, c'est bien ça ?
Je ne l'ai pas encore rencontré, on m'a dit qu'il avait beaucoup de travail avec les pupilles, et comme je connais déjà mes lettres et mes nombres, je devrais attendre un peu avant d'avoir des cours sur les ballades, mais ce n'est pas grave, il y a déjà tant à apprendre ...

S'ensuivit alors ma crise de sentimentalisme, et les larmes que j'avais eu du mal à retenir, bien vite noyée par la honte d'avoir suscité une réaction aussi protectrice de sa part, alors que je me voulais fort et vaillant. Et même si le geste de son bras autour de mes épaules m'avait fait chaud au coeur, suffisamment pour me mettre du mou dans les jambes, je me serais arraché la langue plutôt que de l'avouer.
Le temps que dura cette étreinte me sembla une éternité, et je n'entendit qu'à peine la phrase rassurante qu'elle me dit, et je dus prendre une respiration profonde, ressemblant plutôt à un soupir, presque un sanglot, tout en tapotant la joue de la Dragonne près de moi avant de répondre.

Ce n'est pas de la solitude, dont j'ai peur, c'est de faillir ...

Puis vînt ma question sur les devoirs de l'Ordre, sur sa tâche sur et pour Pern, et là, une fois de plus, la Dame me désarçonna :○ Alors, commençons par le commencement en voyant un peu ce que toi tu penses depuis que tu es au Weyr et puis je te donnerai ma version. Donc, pour toi, quelle est la mission première des Chevaliers, des Dames et des Dragons ? ○
Je la regardais, interloqué. Comment ne pouvais-je savoir ce pour quoi les Chevaliers-Dragons se battaient ? Même si j'avais avoué ne connaitre que les bases des ballades, tout enfant Pernais avait entendu, au moins une fois, les récits et les légendes des combats d'antan ! Puis je remarquais son air sérieux, sa gravité, même, comme s'il était capital que je sois capable de démêler l'Histoire de la Légende, de séparer le vrai du faux.
Je pris ma respiration, ouvris la bouche, mais me ravisai. Après quelques secondes de réflexions, le visage baissé, les sourcils froncés de concentration, je me lançais.
Alors ... Je crois savoir que, depuis la nuit des temps, un danger mortel s'abat sur Pern, venant des cieux. Aux commencement des temps, avant que les Dragons ne viennent en aide aux Hommes, ceux-ci vivaient, terrés dans les cavernes, comme des rampants, et mourraient presque tous lorsque les Fils venaient, car ils tuaient tout, animaux et plantes. Puis les Dragons sont apparus, et se sont alliés aux Hommes, car le feu tuait les Fils aussi bien que l'Eau. Mais comme il n'y avait que peu de Dragons, seuls certains Hommes, et Femmes, aussi, hein ? étaient choisis par Eux. Ils devinrent les Chevaliers-Dragons, et jugèrent de protéger Pern, eux et les descendants, à chaque fois que reviendraient les Fils.
Je dirais donc, Dame Shoneah, que la tâche des Chevaliers, des Dames et des Dragons est de combattre les Fils quand ils reviendront, et ainsi de protéger Pern et tout ce qui y vit ... et s'il le faut, de mourir pour y arriver !

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Assurée que sa journée avait été correcte, qu'il était nourri et en bonne forme, je me chargeai alors d'expliquer à Lÿonel ce qu'était ma citation introductrice de la leçon du jour. Je m'étais arrangée pour y mettre la même foi qu'on m'avait transmise et qui ne me quittait jamais lorsque je pensais à notre mission. ○ Je ... je ne comprends pas tout. ○ On te l'expliquera mieux que je ne le ferai, tu sais. Mais c'est, en gros, je pense, ce à quoi ressemblera Pern quand les Chutes commenceront. Les signes annonciateurs, quoi, et la description de ce qu'il se passe. ○ Fis-je. J'avais beau adorer les Ballades, je n'étais finalement pas devenue Harpiste alors peut-être était-il plus judicieux de laisser Maître Damhàn lui apprendre les bonnes interprétations que de me laisser lui donner la mienne, forgée par les souvenirs de mes enseignements et mes convictions personnelles ? Sans compter que, de mémoire d'hommes et de dragons, personne sur Pern, depuis des révolutions et des révolutions, n'avait connu ce qui était relaté là. Non, finalement, ça ne m'empêcherait pas de répondre aux interrogations du garçon en attendant que Maître Damhàn s'en charge ...

○ Maître Damhàn, dites-vous ? C'est ... ha oui, le harpiste ? Pardon, le Maître Harpiste du Weyr, c'est bien ça ? Je ne l'ai pas encore rencontré, on m'a dit qu'il avait beaucoup de travail avec les pupilles, et comme je connais déjà mes lettres et mes nombres, je devrais attendre un peu avant d'avoir des cours sur les ballades, mais ce n'est pas grave, il y a déjà tant à apprendre ... ○ C'est bien lui. M'est avis que tu ne tarderas pas à faire sa connaissance. Tu verras, c'est un vrai plaisir d'assister à ses classes. ○ J'étais totalement objective, d'abord. UU Depuis le temps que je connaissais le personnage, je pouvais dire avec sincérité qu'il était génial et personne ne pourrait redire quoique ce soit là-dessus, na.

Je m'étonnai ensuite des sanglots de Lÿonel, ayant visiblement mis dans le mille de manière aussi maladroite qu'involontaire. J'ignorais pour ses parents et je me demandai un instant si S'ras était plus au courant que moi. ○ Ce n'est pas de la solitude, dont j'ai peur, c'est de faillir ... ○ De faillir ? Mais c'est des erreurs qu'on apprend. Ou alors c'est la peur de décevoir ? ○ Tentais-je, bien consciente que mes capacités à réconforter quelqu'un s'approchait du charisme d'un ver de sable, autrement dit du néant. uU

Jugeant que la suite de la « leçon » du jour était également un bon sujet, nous bifurquâmes vers les devoirs des Chevaliers. Et, procédant à ma sauce, je laissai d'abord la parole au garçon. Oui oui, ce que je demandais paraissait peut-être aller de soi et sonner comme une évidence mais allez poser la même question dans un fort, tiens ... Vous auriez un autre tintement de cloche. ○ Alors ... Je crois savoir que, depuis la nuit des temps, un danger mortel s'abat sur Pern, venant des cieux. Aux commencement des temps, avant que les Dragons ne viennent en aide aux Hommes, ceux-ci vivaient, terrés dans les cavernes, comme des rampants, et mourraient presque tous lorsque les Fils venaient, car ils tuaient tout, animaux et plantes. Puis les Dragons sont apparus, et se sont alliés aux Hommes, car le feu tuait les Fils aussi bien que l'Eau. Mais comme il n'y avait que peu de Dragons, seuls certains Hommes, et Femmes, aussi, hein ? étaient choisis par Eux. Ils devinrent les Chevaliers-Dragons, et jugèrent de protéger Pern, eux et les descendants, à chaque fois que reviendraient les Fils. Je dirais donc, Dame Shoneah, que la tâche des Chevaliers, des Dames et des Dragons est de combattre les Fils quand ils reviendront, et ainsi de protéger Pern et tout ce qui y vit ... et s'il le faut, de mourir pour y arriver ! ○ Le temps que Lÿonel parlait, je hochais vigoureusement la tête, l'encourageant silencieusement à poursuivre. J'affichais même un grand sourire, sourire qui s'accentuait au fil des propos du Candidat car j'étais agréablement surprise par sa manière d'exposer les choses. ○ Excellent. Et tu as bien dit « quand les Fils reviendront » et pas « s'ils reviennent », chose qui te donne un avantage par rapport à nombre des gens des Forts qui n'ont toujours pas intégré la notion. ○ Souris-je, fière. Oui, j'étais heureuse que ce petit n'ait pas le crâne bourré par les élucubrations des sceptiques pour qui les Fils n'étaient désormais plus qu'un vieux prétexte pour se faire nourrir à l'œil.

○ En effet, donc, les Dragons, les Chevaliers et les Dames ont pour fonction de protéger Pern au péril de leur vie. Cette protection qu'ils garantissent ainsi que leur formation à suivre, les soins à apporter à leur dragon et l'organisation du Weyr, tout ça occupe tout leur temps libre, ce qu'il fait qu'ils ne cultivent pas. C'est pour ça que, en échange de la protection pour les Forts, les Forts envoient une dîme, afin que les Weyrs puissent manger à leur faim. ○ Seulement, maintenant, sans Fils dans le ciel ni Etoile rouge à l'horizon, et sans moyen pour les gens d'aller la voir aux Pierres de l'Etoile quand elle réapparaîtrait, on passait pour des bouffons. ○ Sais-tu alors quel rôle remplissent les Pierres de l'Etoile ? ○ Fis-je.

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**♣ Date de naissance :** 01/05/1245

J'aimais beaucoup la façon dont Dame Shoneah m'encourageait, et même sa certitude que c'est aussi "de ses erreurs qu'on apprend" me fit sourire. Ma propre mère n'aurait pas dit mieux ! Quand à mon exposé, je le devais uniquement à sa manière de m'avoir raconté les légendes et les ballades, toutes mêlées dans sa vision épique du passé, de notre histoire. Et je fus très surpris de la réaction de la Dame verte.

Vous dites que les gens des forts ne croient pas dans la réalité des Chûtes et des Fils ? Comment est-ce possible ?
D'un autre coté, je ne connais presque rien des forts, après tout, à peine plus que du Weyr ... Nous vivions sur les routes, toujours entre un point et un autre, ma mère collectait des ingrédients pour les pigments, inventait de nouvelles recettes, et ne passait que de temps en temps à Ista pour remettre ses notes de recherches à l'Atelier. Je n'ai pas du mettre les pieds au Fort plus de six ou sept fois dans ma vie, et même alors, je restait près des portes.

J'écoutais avec attention sa petite leçon sur l'économie symbiotique régissant l'union des Forts et des Weyrs. Je ne voyais pas pourquoi les gens des Forts voulaient remettre ça en cause, il devait me manquer un élément. Mais déjà, la conversation reprenait, le cours continuait.

○Sais-tu alors quel rôle remplissent les Pierres de l'Etoile ?○

Je me tournais vers les pierres, et m'approchais pour les examiner. Rien dessus ne semblait pouvoir bouger, il n'y avait ni signes, ni écriture, et s'il était manifeste que la nature n'avait pas été seule à l'oeuvre pour leur donner forme, cela devait remonter à tant d'années dans le passé que plus une trace n'en subsistait. Non, vraiment rien ne pouvait m'aider à trouver la solution de cette énigme, si ce n'est le fragment de ballade que m'avait cité la Dame peu de temps auparavant.

Hé bien ... si j'en juge par la ballade de tout à l'heure ... et vu que cette pierre est percée, je dirais ... peut-être qu'en regardant par le trou, on verra la fameuse Etoile Rouge au moment où elle apparaitra dans le ciel, nous prévenant par là du retour des Fils. Même si je ne sais vraiment pas par quel mystère une étoile pourrait bien se promener dans le ciel, vu que tout le long de la nuit, les autres étoiles ne font que se promener plus ou moins en rond autour de nous ...

○•○

J'étais peut-être d'un enthousiasme excessif, j'estimais tout de même que la motivation et l'encouragement menaient à davantage de résultats que les brimades et les réprimandes. D'autant plus quand les félicitations étaient justifiées ! Il se débrouillait bien, ce petit. Et puis je ne voulais pas la jouer à la K'lsay avec une combinaison « intimidation/remarques cinglantes » juste dans le but de tester Lÿonel et au final le terroriser plus qu'autre chose. Oui, voilà, A'shua était l'exemple à suivre, plutôt, même si j'étais moins sévère que lui dans mon perfectionnisme. Même si, lui, il était toujours juste. Rigoureux, mais juste.

...

Comment ça, je m'égarais ? T_T

Trêve de considérations abstraites, nous étions en plein sujet délicat : les Forts et, plus précisément, l'attitude des Forts envers nous. ○ Vous dites que les gens des forts ne croient pas dans la réalité des Chûtes et des Fils ? Comment est-ce possible ?
D'un autre coté, je ne connais presque rien des forts, après tout, à peine plus que du Weyr ... Nous vivions sur les routes, toujours entre un point et un autre, ma mère collectait des ingrédients pour les pigments, inventait de nouvelles recettes, et ne passait que de temps en temps à Ista pour remettre ses notes de recherches à l'Atelier. Je n'ai pas du mettre les pieds au Fort plus de six ou sept fois dans ma vie, et même alors, je restait près des portes. ○ J'écoutai avec intérêt les explications du petit garçon, surprise par cet éloignement du monde qui avait été le sien durant ses jeunes années. Moi qui avais grandi au milieu des gamins du Fort, entre les voisins et les camarades aux cours du Harpiste, j'avais toujours été très entourée. Mais, avant toute chose, je répondis à son interrogation. ○ Il se fait que ... les mentalités dans les Forts sont plus ... conservatrices ? Disons que, en la présence de Fils, payer la Dîme allait dans leur intérêt et ne causait aucun ... appauvrissement, dirons-nous, puisque les Chevaliers-Dragons, par leur protection, préservaient les récoltes, etc. des Fils. Ici, pour les gens des Forts, la protection est superflue, donc la Dîme aussi. Et ils sont persuadés que les Fils n'existent plus parce qu'ils ne sont pas revenus en temps et en heure, qu'après autant de révolutions sans eux, c'est qu'ils ont disparu. Qu'on m'explique comment ... ○ Soupirais-je. J'avais beau être née dans un Fort, ça m'échappait. J'avais eu des parents ouverts, oui, mais surtout critiques. Et, outre la foi portée dans les Ballades - dont aucune ne mentionnait l'extinction des Fils, notez bien -, il y avait aussi cette prudence qui poussait à d'abord se protéger « dans le doute » plutôt que de criticailler et remettre en question la parole des Chevaliers jurant le retour de la menace tout proche. Méchamment, je serais curieuse de voir leur tête le jour j. u.u

Jour j que nous indiquerait l'Etoile Rouge que nous révèleraient les Pierres de l'Etoile, Pierres dont je demandai l'utilité à Lÿonel. ○ Hé bien ... si j'en juge par la ballade de tout à l'heure ... et vu que cette pierre est percée, je dirais ... peut-être qu'en regardant par le trou, on verra la fameuse Etoile Rouge au moment où elle apparaitra dans le ciel, nous prévenant par là du retour des Fils. Même si je ne sais vraiment pas par quel mystère une étoile pourrait bien se promener dans le ciel, vu que tout le long de la nuit, les autres étoiles ne font que se promener plus ou moins en rond autour de nous ... ○ Bieeeeeen ! Je crois que Maître Damhàn sera vraiment ravi de t'avoir pour élève, m'exclamais-je, réellement enthousiaste, avant de poursuivre, c'est bien ça ! Comme le dit la Ballade, « Le Doigt se tend vers un Œil de sang. » Niveau astronomie, il y a plus calé que moi, mais il me semble pouvoir résumer en disant que l'orbite de l'Etoile rouge n'est pas fixe. C'est pour ça que, lorsqu'elle est visible dans les Pierres, c'est qu'elle est placé de telle façon par rapport à Pern que les Fils pourront tomber à nouveau. ○ Tentais-je le plus clairement possible, ayant la fâcheuse tendance en astronomie de comprendre le principe mais de faire une bien piètre enseignante. Uu

Laissant à Lÿonel le loisir de poser des questions sur le sujet s'il le désirait, je fis une légère pause avant d'aborder un autre thème. Pause que je consacrai à ma curiosité. UU ○ Dis-moi, tu ... tu étais vraiment tout seul avec ta mère ? Pas d'enfants de ton âge ... Enfin, je ... je ne veux pas t'embarrasser avec ça. J'ai encore des trucs à te raconter sur les principales règles de sécurité avec la verdure si ... si tu préfères. ○ Bafouillais-je, particulièrement douée lorsque je m'aventurais au sein de chapitres délicats.

○•○

**♣ Date de naissance :** 01/05/1245

Ainsi donc, les Forts rechignaient à nourrir les Weyrs, parce qu'ils ressentaient la Dîme comme une contrainte, comme un appauvrissement, tant qu'ils n'en voyaient pas l'obligation ? Si la surprise n'avait pas été aussi grande, l'idée aurait pu me faire rire. Seulement voilà, le rire n'aurait surement pas plu à Dame Shoneah, et aussi gentille et prévenante soit-elle, je n'avais pas vraiment envie de la mettre en colère.
Il me fallait raisonner, comprendre le sens de tout ceci, et surtout, surtout, éviter de dire des bêtises.

Vous me dites que les gens des Forts ne veuillent plus payer la dîme parce qu'on a pas vu les Fils depuis longtemps ? Pourtant, dans le passé, y a t-il jamais eu un homme qui ait vécu deux passages au cours de sa vie ?, Et pourtant, on y a toujours cru, la preuve en est que les Weyrs et les Chevaliers sont toujours là, non ?
Peut-être aussi faudrait-il trouver autre chose que seuls les Weyrs peuvent faire, pour le monnayer contre des ressources ...

La conversation, et la leçon, avaient suivi leurs cours, et à la question sur l'usage des pierres, ma réponse n'avait été dictée que par mon simple bon sens, et mon raisonnement semblait m'avoir mené dans la bonne direction tant la Dame semblait enthousiasmée par ma répartie.

○ Bieeeeeen ! Je crois que Maître Damhàn sera vraiment ravi de t'avoir pour élève, c'est bien ça ! Comme le dit la Ballade, « Le Doigt se tend vers un Œil de sang. » Niveau astronomie, il y a plus calé que moi, mais il me semble pouvoir résumer en disant que l'orbite de l'Etoile rouge n'est pas fixe. C'est pour ça que, lorsqu'elle est visible dans les Pierres, c'est qu'elle est placé de telle façon par rapport à Pern que les Fils pourront tomber à nouveau. ○

Je crois que je serai encore plus ravi d'être son élève, entendu comme vous parlez de lui, ça m'a l'air d'un homme formidable ! Et j'aimerais bien comprendre cette idée d'une étoile qui puisse bouger ...
Et les Fils qui ne tomberaient que lorsqu'elle est à un certain endroit, ça aurait un rapport avec le vent ?

Je me perdais en conjectures sur la nature supposée des Fils, ne les ayant jamais entendu décrire que comme un Fléau ravageur, brulants tout sur leur passage, et même au-delà...
Je grattouillais machinalement le cuir de la Dragonne, sentant la chaleur de sa présence me protéger et du vent, et de la fraicheur qui tombait avec la nuit.

○ Dis-moi, tu ... tu étais vraiment tout seul avec ta mère ? Pas d'enfants de ton âge ... Enfin, je ... je ne veux pas t'embarrasser avec ça. J'ai encore des trucs à te raconter sur les principales règles de sécurité avec la verdure si ... si tu préfères. ○

Non ... non, ça va, je peux parler de ça, je ne vais pas pleurer, je suis grand maintenant. Il me fallut quand même avaler un gros soupir. Oui, j'étais seul avec elle, même si on s'arrêtait bien parfois un jour ou deux dans certaines exploitations éloignées, ou dans des forts mineurs, ici ou là. On passait aussi des fois la nuit avec d'autres voyageurs, dans des campements sur la route, et on y échangeait des nouvelles. J'ai croisé d'autres gens, et même des enfants, mais je n'ai pas partagé grand choses avec eux. Pourtant, je pense que ma mère avait prévu de me mettre en apprentissage, un jour, on avait commencé à en parler. Mais ça ne me faisait pas peur, je connaissais assez le monde, et les quelques Harpistes qu'on a croisé parfois m'ont toujours dit que je me débrouillais bien avec mes nombres et mes lettres.

Quelque part, j'avais l'impression que parler de ma vie d'avant me la rendait moins lourde à porter, comme si mettre des mots sur les idées me permettait de penser enfin à autre chose.

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Bwah, je n'étais guère sévère et j'aimais bien parler de ce genre de thèmes. Enfin, j'aurais préféré ne jamais avoir à les aborder parce que les rapports Weyr/Fort seraient au beau fixe mais c'était un plaisir d'avoir en face de soi un jeune garçon intéressé par ces soucis de cohabitation. ○ Vous me dites que les gens des Forts ne veuillent plus payer la dîme parce qu'on a pas vu les Fils depuis longtemps ? Pourtant, dans le passé, y a t-il jamais eu un homme qui ait vécu deux passages au cours de sa vie ?, Et pourtant, on y a toujours cru, la preuve en est que les Weyrs et les Chevaliers sont toujours là, non ? Peut-être aussi faudrait-il trouver autre chose que seuls les Weyrs peuvent faire, pour le monnayer contre des ressources ... ○ J'eus un franc sourire. Dommage que davantage de Pernais n'aient pas autant de sens critique que Lÿonel. ○ C'est bien simple, pour eux, un passage dure maximum deux cents révolutions. Vu qu'on a dépassé cette durée, ça leur semble étrange. Personnellement, je me fie aux Archives et aux Harpistes pour combler ce qu'on ne peut connaître puisque, en effet, aucun homme n'a pu vivre assez longtemps pour connaître deux passages. Rien n'indique que les Fils ont déjà cessé de tomber sur Pern aussi longtemps. Rien n'indique que ça n'a pas été le cas. Et rien n'indique que les Fils ont disparu. La prudence commande alors de se tenir prêts et de s'armer, de s'entraîner aux périodes sombres à venir. Tu vois, nos dragons nous disent que les Fils vont revenir et j'ai une confiance absolue en Taleith, détaillais-je, ma Dragonne roucoulant tout en me cognant amicalement l'épaule du bout de son museau, donc ce que nous « échangerons » bientôt contre la Dîme, c'est la protection de Pern, nos vies mises à son service. Une récolte prend un certain temps avant d'être bonne. Eh bien entraîner des Chevaliers-dragons, c'est pareil. Ca s'inscrit simplement sur une plus longue durée que de faire pousser de l'orge ou du froment. On en retire le bénéfice après, des années après, grâce à un bon entretien de nos savoirs et une continuité dans notre ordre. C'est là le souci, les gens des Forts ont l'impression qu'on les trompe en ne faisant « rien » alors que, simplement, si j'ose dire, il nous faut plus de temps pour nous former que pour faire une chemise de lin. ○ Soupirais-je, ayant expliqué avec force métaphores ce que j'estimais être une bonne partie du problème de la mésentente avec les Forts, outre le fossé qui nous rendait presque étrangers les uns aux autres.

Les Pierres de l'Etoile pourraient aider à améliorer les rapports, si tant est qu'elles soient plus accessibles un jour. Je me cantonnai pour le moment à vérifier que Lÿonel en connaissait bien l'utilité. ○ Je crois que je serai encore plus ravi d'être son élève, entendu comme vous parlez de lui, ça m'a l'air d'un homme formidable ! Et j'aimerais bien comprendre cette idée d'une étoile qui puisse bouger ... Et les Fils qui ne tomberaient que lorsqu'elle est à un certain endroit, ça aurait un rapport avec le vent ? ○ C'est un homme formidable, tu verras, je suis sûre que tu l'adoreras ! Et un puits de sciences, avec ça, il t'éclairera plus que moi sur toutes ces questions. Ceci dit, pour le vent, c'est possible mais est-ce qu'on sait s'il y a du vent là-bas ? ○ Je m'improvisais professeur, j'étais loin d'avoir réponse à tout. J'ignorais si, entre l'Etoile rouge et ici, là-bas, donc, il y avait du vent. Ni même sur l'Etoile rouge, d'ailleurs. Je ne savais pas exactement ce qui « favorisait » la tombée des Fils sur notre planète lorsque le sinistre astre était suffisamment proche de nous, à dire vrai ...

Voilà qui serait matière à réflexion, tiens, et je notai cette question dans un coin de mon esprit. Les Ballades aideraient peut-être et Maître Damhàn, lui, certainement ! J'aurais donc de quoi l'ennuyer prochainement.

Taleith ronronna au contact du Candidat, accentuant son doux murmure lorsque je bifurquai vers un sujet plus délicat. ○ Non ... non, ça va, je peux parler de ça, je ne vais pas pleurer, je suis grand maintenant. ○ Courageux, surtout, et je lui adressai un sourire bienveillant en posant ce constat. ○ Oui, j'étais seul avec elle, même si on s'arrêtait bien parfois un jour ou deux dans certaines exploitations éloignées, ou dans des forts mineurs, ici ou là. On passait aussi des fois la nuit avec d'autres voyageurs, dans des campements sur la route, et on y échangeait des nouvelles. J'ai croisé d'autres gens, et même des enfants, mais je n'ai pas partagé grand choses avec eux. Pourtant, je pense que ma mère avait prévu de me mettre en apprentissage, un jour, on avait commencé à en parler. Mais ça ne me faisait pas peur, je connaissais assez le monde, et les quelques Harpistes qu'on a croisé parfois m'ont toujours dit que je me débrouillais bien avec mes nombres et mes lettres. ○ Ooooh, tu as vu du pays, alors ? Je n'ai jamais fait de longues escales ailleurs. Les seules fois où j'ai vu autre chose qu'Ista, c'est en jouant les messagères ou les transporteurs pour les personnalités de passage au Weyr. Et je peux te dire que mes arrêts étaient courts. Très. ○ Ris-je. Service-service, avais-je tendance à appliquer, à l'époque. Les seules foires que j'avais vues étaient celles d'Ista et, là, je devais tout de même avouer en avoir ratées le moins possible. ○ Tu as déjà été à une foire d'ici, d'ailleurs ? ○ Questionnais-je donc.

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**♣ Date de naissance :** 01/05/1245

J'essayais bien de comprendre ces rapports étroits, existants entre les weyrs et les forts, rapports qui garantissaient la survie de tous et de chacun. Même si je n'approuvais pas, je pouvais tout de même comprendre les réticences des Fortains, leur sentiment d'être dépouillés, par manque de compensation visible, du fruit de leur travail.

Je pense qu'il doit être difficile pour eux de vivre sur des promesses, même si la réalisation de celles-ci signifie le danger et la guerre, la destruction et la mort possible pour leur famille et leur village. Et cela doit être dur, même si ces promesses sont fondées sur une tradition ancestrale. Je comprend très bien qu'ils puissent vouloir une contrepartie plus immédiate à leur sacrifice. Il y a peut-être quelque chose que le Weyr sait faire, mais pas le Fort, non ?

Je comprenais tout à fait cette vision de compétences longues à acquérir, d'entrainement ardu, exigeant, ne laissant pas de temps pour d'autres activités, et je hochais la tête pour bien montrer que j'étais d'accord avec elle.
Et malgré la présence des Pierres sous nos yeux, la conversation s'égara sur des chemins plus lointains, me donnant à penser que dans sa tête, Dame Shoneah n'était pas bien plus vieille que moi, et que son étonnement, sa curiosité sur le monde du dehors valait bien les miens sur le monde du Weyr.

○ Ooooh, tu as vu du pays, alors ? Je n'ai jamais fait de longues escales ailleurs. Les seules fois où j'ai vu autre chose qu'Ista, c'est en jouant les messagères ou les transporteurs pour les personnalités de passage au Weyr. Et je peux te dire que mes arrêts étaient courts. Très ... Tu as déjà été à une foire d'ici, d'ailleurs ? ○

Oui, du pays, j'en ai vu, j'ai vécu les tempêtes de poussière dans les plaines d'Ista, j'ai vu les orages sur la Route de Mille Crètes, j'ai marché au bord de la mer, d'une couleur pouvant aller de l'ardoise la plus sombre de la colère des ouragans d'hiver, au turquoise le plus brillant de la félicité du printemps.
J'ai marché dans les forêts dans les quatre saisons, j'ai vu passer les arbres par plus de couleurs que je n'aurai jamais de pigments pour le rendre, j'ai vu plus de paysages qu'il n'y a d'habitants ici, Weyr et Fort réunis.

Et pourtant, je ne sais rien du monde qui m'entoure, rien du destin qui m'attend, rien de la guerre à venir, rien des douleurs qui vont meurtrir Pern, si ce n'est ce que les balades en ont dit.
Et non, je n'ai jamais été à la foire ... ni ici, ni ailleurs.

Mon regard se perdait maintenant dans le lointain. La nuit était venue, et je ne devinais la position de la mer qu'aux reflets changeants de l'eau sous les étoiles. On ne voyais pas le Fort, d'ici, mais quelques lumières lointaines signalaient la présence des mines, dans les collines.
La main toujours sur la joue de la Dragonne, je m'abimais dans mes réflexions.

Vous ...vous avez dit "messagère", non ? Vous avez parlé de transport pour les gens du fort ? C'est vrai qu'un vol de Dragon est plus rapide que le plus rapide des coureurs, et qu'il na pas à se soucier de l'état de la route ...
Voilà peut-être ce que le Weyr peut faire pour le Fort, pour faire baisser la tension entre eux...

Mes dernières paroles n'appelaient pas vraiment de réponse, c'était plus comme si j'avais pensé tout haut ...

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Du mieux possible, j'expliquai à Lÿonel la manière dont je percevais les rapports entre les Weyrs et les Forts, heureuse de trouver en lui un interlocuteur attentif. ○ Je pense qu'il doit être difficile pour eux de vivre sur des promesses, même si la réalisation de celles-ci signifie le danger et la guerre, la destruction et la mort possible pour leur famille et leur village. Et cela doit être dur, même si ces promesses sont fondées sur une tradition ancestrale. Je comprend très bien qu'ils puissent vouloir une contrepartie plus immédiate à leur sacrifice. Il y a peut-être quelque chose que le Weyr sait faire, mais pas le Fort, non ? ○ Je haussai les épaules, prenant conscience que tout était réellement une question de point de vue. ○ Oui, je sais bien, c'est difficile pour eux. Et nous, de notre côté, on ne touche pas le moindre mark. Je dois mon argent au travail de mon père. Chacun défend son bout de pain bec et ongle et, normalement, personne n'est à blâmer pour ça. Mais que faire en échange ? Bonne question. On ne peut se former et apprendre un autre « métier » en parallèle. Et un truc spécifique au Weyr ... Oui, il faudrait trouver. ○ Le flot confus de mes pensées sortait librement par mes lèvres, m'aidant à y mettre de l'ordre tandis que j'énonçais à haute voix les réponses qui me venaient à l'esprit suite aux questions du garçon.

J'étais néanmoins plus à l'aise, plus claire - du moins, je l'espérais - lorsque j'amenais la conversation sur le sujet des Pierres de l'Etoile. Il y avait des bases à acquérir, des élémentaires à savoir en tout temps et ceux-là en faisaient partie. Puis il y avait ma curiosité qui ressortait au détour d'un échange de paroles plus classiques et j'interrogeai donc le Candidat sur sa vie d'avant. ○ Oui, du pays, j'en ai vu, j'ai vécu les tempêtes de poussière dans les plaines d'Ista, j'ai vu les orages sur la Route de Mille Crètes, j'ai marché au bord de la mer, d'une couleur pouvant aller de l'ardoise la plus sombre de la colère des ouragans d'hiver, au turquoise le plus brillant de la félicité du printemps. J'ai marché dans les forêts dans les quatre saisons, j'ai vu passer les arbres par plus de couleurs que je n'aurai jamais de pigments pour le rendre, j'ai vu plus de paysages qu'il n'y a d'habitants ici, Weyr et Fort réunis. Et pourtant, je ne sais rien du monde qui m'entoure, rien du destin qui m'attend, rien de la guerre à venir, rien des douleurs qui vont meurtrir Pern, si ce n'est ce que les balades en ont dit. Et non, je n'ai jamais été à la foire ... ni ici, ni ailleurs. ○ Je restai un instant rêveuse face à tous ces paysages, toutes ces facettes de Pern qu'il avait eu l'opportunité de découvrir, contrairement à moi. Ca semblait tellement pour un petit bout d'homme, pour un garçon dont presque dix années me séparaient. Jalouse ? Non. Mais pensive, surtout face à l'entièreté du personnage qu'il donnait à voir au monde. Un enfant fort, courageux, déterminé ... Pour quelqu'un qui disait ne pas en avoir beaucoup vu ... ○ On en tire toujours une expérience. Et tu es plus posé que bien des garçons de ton âge. Ca veut déjà au moins dire que tu en as vu plus qu'eux, non ? ○ Souris-je, évitant d'insister sur la perte de ses deux parents qui ne devait certainement pas être étrangère à cette force de caractère. Ou à cette carapace ?

○ Pour les foires, je tenterai de t'y emmener, si j'obtiens les permissions. ○ Assurais-je, un grand sourire aux lèvres. Ca n'était pas gagné d'avance mais qui ne tentait rien n'avait rien, non ?

Les yeux perdus dans le ciel, pestant intérieurement de le trouver si calme, je redescendis sur terre quand Lÿonel reprit la parole. ○ Vous ...vous avez dit "messagère", non ? Vous avez parlé de transport pour les gens du fort ? C'est vrai qu'un vol de Dragon est plus rapide que le plus rapide des coureurs, et qu'il na pas à se soucier de l'état de la route ... Voilà peut-être ce que le Weyr peut faire pour le Fort, pour faire baisser la tension entre eux... ○ Hmmm, commençais-je, me pinçant l'arrête du nez en songeant à cette proposition, oui, j'ai déjà servi de messagère et j'ai déjà transporté des gens du Fort vers le Weyr et vice-versa. Ca se fait même si notre présence dans les Forts est ... mal perçue. Plus les courses sont brèves, mieux c'est. Mais donc, on intensifiant ça, on porterait cette activité au rang de contrepartie de la dîme, c'est ça ? ○ Demandais-je pour obtenir confirmation. Oui, c'était à garder sous le coude ...

○ Ceci dit, tu vois, je t'explique le léger souci ... Les messagers sont avant tout les Aspirants Mineurs, quand ils sont suffisamment formés pour voler avec leur dragon mais pas assez pour s'entraîner dans une escadrille, pour grossir le trait. En gros, je ne suis plus messagère mais il m'arrive parfois de quand même ramener un pote chez lui quand il a fait une livraison chez nous. Tu connais Niamh, d'ailleurs ? ○ Fis-je, lançant la discussion sur deux tableaux, certes, mais tenant quand même d'approfondir l'idée de Lÿonel en lui soumettant ce que je jugeais être un écueil, curieuse de voir ce que son esprit d'analyse démêlerait de tout ceci.

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**♣ Date de naissance :** 01/05/1245

Les explication de la Dame sur l'importance de la monnaie, sur le fait que personne aux Weyr n'était payé et que le Fort, lui, ne vivait que par ça, et que pour ça, me plongeaient dans des abîmes de perplexité. J'avais bien intégré la notion d'échanges, de contreparties, la base même du troc, mais le concept de monnaie me perturbait, tant par son importance pour les uns que par son inexistence chez les autres. J'avais vraiment le sentiment que le Weyr et le Fort étaient deux mondes étrangers, devant se côtoyer sans arriver à s'entendre.

Mais déjà, Dame Shoneah s'intéressait à ma vie d'avant mon arrivée, et je me laissais aller, dans ma description des merveilles que j'avais vu au cours de mes voyages.

○ On en tire toujours une expérience. Et tu es plus posé que bien des garçons de ton âge. Ca veut déjà au moins dire que tu en as vu plus qu'eux, non ? ○ ... ○ Pour les foires, je tenterai de t'y emmener, si j'obtiens les permissions. ○

Je la regardais alors, un peu surpris de tant d'attentions, me demandant ce qui pouvait bien me valoir ce que je comprenais être un compliment, pour elle, et cette invitation à un évènement que je savais être partagé en famille, même si je n'en avais jamais connu personnellement

Je suppose que c'est bien d'être ... posé, comme vous dites, mais j'ai entendu une fille des cavernes de mon âge dire de moi, quand j'avais le dos tourné, que j'était chiant comme la pluie. Peut-être que mon expérience fait de moi quelqu'un de bizarre, plus tout à fait enfant, et loin d'être déjà adulte ?
Pour les Foires, je croyais qu'on y allait en famille, et qu'elles servaient aux échanges de biens plus importants que les simples achats courants ...
Je ne crois pas que ma mère m'ait laissé le moindre argent, à sa mort, et le chariot ayant été rendu à l'Atelier des Tisserands, la seule chose que je possède, c'est ma pochette de dessins, et je doute que qui que ce soit veuille en acheter, donc, n'ayant rien à vendre, je n'aurai pas d'argent pour acheter, et se promener au milieu de toutes les merveilles d'une foire sans pouvoir en avoir une seule doit faire plus de mal que de bien ...

Je poussais un profond soupir, me rendant bien compte que même si ma vie d'avant n'avait pas été tous les jours ce qu'on pouvait qualifier d'ordinaire, avec ses voyages qui m'éloignaient sans cesse de la compagnie d'autre gens, ma nouvelle vie, malgré ses mille merveilles, ses surprises sans cesse renouvelées et ses responsabilités à venir, ne faciliterait pas ma socialisation auprès des gens dits - et qui se croyaient - normaux.
Mais la Dame verte semblait trouver que mon idée n'était pas si bête, et déjà son esprit arpentait les chemins de la réflexion, tâchant de dégrossir ma simple réflexion pour en faire un concept utilisable.

○ Hmmm, oui, j'ai déjà servi de messagère et j'ai déjà transporté des gens du Fort vers le Weyr et vice-versa. Ca se fait même si notre présence dans les Forts est ... mal perçue. Plus les courses sont brèves, mieux c'est. Mais donc, on intensifiant ça, on porterait cette activité au rang de contrepartie de la dîme, c'est ça ? ...
Ceci dit, tu vois, je t'explique le léger souci ... Les messagers sont avant tout les Aspirants Mineurs, quand ils sont suffisamment formés pour voler avec leur dragon mais pas assez pour s'entraîner dans une escadrille, pour grossir le trait. En gros, je ne suis plus messagère mais il m'arrive parfois de quand même ramener un pote chez lui quand il a fait une livraison chez nous. Tu connais Niamh, d'ailleurs ?○

Mon esprit tournait à plein régime, ma tendance naturelle étant à vouloir améliorer les choses, de la simple porte mal fixée à la tâche la plus complexe pouvant nécessiter des dizaines de personnes travaillant ensemble sans se marcher dessus.
J'avais beau tourner et retourner les données du problème dans ma tête, je ne le voyais justement pas ... le problème.

Et bien, je ne sais pas, mais ...on est pas obligé de leur dire que ça nous sert d'entrainement que de leur rendre un service, si ? Et puis je suis sur que les Chevaliers les plus expérimentés ont moins besoin de s'entrainer pour les escadrilles, on pourrait alors leur confier les voyages les plus longs.
Et il y a surement d'autres choses qu'on saurait faire, comme voler, en s'entrainant, par exemple, au dessus de la mer et repérer les bancs de poissons pour les signaler aux pécheurs...
Et non, je ne crois pas connaitre Niamh, qui est-ce ?

○•○

Même si je trouvais passionnante la conversation sur les Weyrs et les Forts, je ne pus m'empêcher de vouloir en savoir davantage sur ce qu'avait vécu Lÿonel avant de débarquer ici. Je n'imaginais pas qu'il avait eu une vie comme la mienne puisqu'il n'était pas né au Weyr, lui non plus, mais je n'avais pas songé un instant que nos parcours puissent être si différents. ○ Je suppose que c'est bien d'être ... posé, comme vous dites, mais j'ai entendu une fille des cavernes de mon âge dire de moi, quand j'avais le dos tourné, que j'était chiant comme la pluie. Peut-être que mon expérience fait de moi quelqu'un de bizarre, plus tout à fait enfant, et loin d'être déjà adulte ? ○ J'éclatai de rire, un rire franc impossible à retenir aux paroles du garçon. ○ Alors, fis-je pour me rendre une contenance, il y a une grande règle à retenir, pour le Weyr comme pour partout ailleurs : fiche-toi des racontars ... Les gens ne nous connaissent jamais réellement et se fient sur les « on dit » donc 'faut pas faire attention. Sois toi-même, c'est tout ce qui compte. ○ Souris-je.

Oooh, oui, j'avais l'habitude des persifflages et autres rumeurs sur mon compte. Au début, ça blesse. Ca nous pousse même à nous remettre en question. Puis ça agace, ça irrite, ça énerve et ça ronge. Là était le moment de s'en détacher pour éviter de se faire plus de mal qu'autre chose. Et comme il était théoriquement possible de poser cette distance dès le début, plutôt que de subir toutes les étapes, autant permettre au Candidat de s'y atteler directement.

Enfin, si j'avais déjà été surprise de ses propos concernant les ragots, je le fus plus encore en l'entendant me répondre pour les foires. ○ Pour les Foires, je croyais qu'on y allait en famille, et qu'elles servaient aux échanges de biens plus importants que les simples achats courants ... Je ne crois pas que ma mère m'ait laissé le moindre argent, à sa mort, et le chariot ayant été rendu à l'Atelier des Tisserands, la seule chose que je possède, c'est ma pochette de dessins, et je doute que qui que ce soit veuille en acheter, donc, n'ayant rien à vendre, je n'aurai pas d'argent pour acheter, et se promener au milieu de toutes les merveilles d'une foire sans pouvoir en avoir une seule doit faire plus de mal que de bien ... ○ Bah, il y a toujours moyen de grappiller quelque part, je peux t'offrir une tourte sans que tu ne te sentes d'office redevable puis, les foires, c'est aussi la détente, les chants, les danses, bref, des réjouissances ! Et n'oublie jamais que le Weyr est une grande famille, hein. ○ Avec dedans des gens super sympas, des abrutis, des gens qu'on étranglerait bien et d'autres dont on ne se séparait jamais. Il fallait de la solidarité et du soutien, donc du partage.

Tout comme l'écoute, le dialogue et l'échange ... C'était plus agréable de sentir qu'on n'était pas seul, que, différence d'âge ou pas, on avait toujours des interlocuteurs avec qui partager ses idées, défendre son point de vue, bref, débattre et avancer. J'estimais faire partie de ces personnes-là, ces personnes avec qui la discussion était possible, appréciée et même encouragée. ○ Et bien, je ne sais pas, mais ...on est pas obligé de leur dire que ça nous sert d'entrainement que de leur rendre un service, si ? Et puis je suis sur que les Chevaliers les plus expérimentés ont moins besoin de s'entrainer pour les escadrilles, on pourrait alors leur confier les voyages les plus longs. ○ Ca se défend, oui ... ○ Commençais-je, me remémorant ma discussion avec S'ras sur le sujet pour tempérer ma propre position. Pas que je sois extrême quand on parlait de cela mais ... un peu. Je tolérais mal, voire pas du tout, qu'on nous prenne pour des parasites, aussi avais-je tendance à m'enflammer plus que nécessaire. Or, ici, c'était déconseillé si je souhaitais rester objective. ○ Et il y a surement d'autres choses qu'on saurait faire, comme voler, en s'entrainant, par exemple, au dessus de la mer et repérer les bancs de poissons pour les signaler aux pécheurs... ○ Ce sont de très bonnes idées, ça. Mais ce qu'il y a, aussi, c'est que les gens des Forts veulent réellement avoir le moins à faire avec nous ... Moins ils nous voient, mieux ils se portent et un service de notre part est vu comme un cadeau empoisonné. Et, dans l'absolu, si la sauce prend, j'ai peur justement qu'ils prennent le pli et que nous ne sachions plus et les aider pour ça et combattre les Fils quand ils tomberont, tu vois ? ○ Ajoutais-je, mettant de l'ordre dans mes idées en les énonçant. Je comptais également sur la réflexion de Lÿonel pour contredire ou confirmer mon assertion afin que le débat progresse.

○ Et non, je ne crois pas connaitre Niamh, qui est-ce ? ○ Une bonne amie à moi qui est née au Weyr ! Elle bosse à l'Atelier des Verriers. T'aimes la verrerie, toi ? Enfin, de toute façon, je te la présenterai certainement quand elle viendra, si tu veux. C'est quelqu'un de sympa. ○ Bon, d'accord, avec moi, beaucoup de gens étaient sympas mais Niamh était vraiment sympa sympa. Sympa ².

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**♣ Date de naissance :** 01/05/1245

Ne pas écouter les racontars, se moquer des on-dits, vivre sa propre vie sans penser sans cesse à son image ... voilà qui aurait surement fait sourire ma mère, elle qui s'était coupée du monde par soucis de son image et pour m'épargner la moquerie et la méchanceté des gens.

Etre soi-même ? Les gens sont-ils moins méchants si on ne les écoute pas ? J'en doute un peu ...
Et puis, si on veut être un chef, un meneur, on doit faire attention à son image, on est mieux suivi par les gens qui nous respectent que par ceux qui se moquent de nous, non ?

Je pensais vraiment que donner confiance était une clef des bonnes relations avec autrui, et j'étais prêt à faire de mon mieux dans ce sens.
Le chapitre des Foires était certes intéressant, mais je connaissais - ou croyais connaitre - les limites de ma vie sociale en fonction de mon manque de richesses. Mais la Dame Verte faisait miroiter devant moi un autre aspect des Foires que je ne connaissais pas, tout le côté festif de ces réunions occasionnelles de gens divers et pour beaucoup, venant de loin.

○ Les foires, c'est aussi la détente, les chants, les danses, bref, des réjouissances ! Et n'oublie jamais que le Weyr est une grande famille, hein. ○

Oui, une grande famille, plus grande que ce que je n'avais jamais rêvé, plus nombreuse que tous les gens que j'avais déjà vu dans ma vie, Si grande que j'en avais parfois le tournis.

Oui ... une famille si grande qu'il doit parfois être difficile de s'entendre avec tout le monde, non ?
Mais c'est vrai que j'aimerais bien entendre les chants et la musique, et voir les danses aussi.
Moi, je ne sais ni jouer, ni chanter, ni danser, juste dessiner, je ne suis pas sur que ça serve dans les festivités.

Le sérieux avec lequel Dame Shoneah m'écoutait exposer mes idées d'échange avec les forts me laissait penser que la question n'était pas nouvelle pour elle, qu'elle avait du en débattre avec d'autres. Elle avait une façon très pertinente de remettre en cause certaines de mes idées, comme pour aller jusqu'au bout, comme pour être sure qu'on avait bien tout envisagé avant d'aller plus loin.

○ Ce sont de très bonnes idées, ça. Mais ce qu'il y a, aussi, c'est que les gens des Forts veulent réellement avoir le moins à faire avec nous ... Moins ils nous voient, mieux ils se portent et un service de notre part est vu comme un cadeau empoisonné. Et, dans l'absolu, si la sauce prend, j'ai peur justement qu'ils prennent le pli et que nous ne sachions plus et les aider pour ça et combattre les Fils quand ils tomberont, tu vois ? ○

Il me fallut un petit moment pour tourner et retourner l'argument, avant de trouver la parade, et de l'énoncer avec un sourire.

On est bien d'accord ... seulement, je crois que lorsque les fils tomberont, ils auront eux aussi bien d'autres wherries à fouetter que d'aller se promener à l'autre bout du continent, et préfèreront se cacher que d'aller risquer leur vie sur leurs bateaux sous une pluie plus brûlante que le feu...

Je me laissais un peu aller, m'appuyant légèrement sur le Flan de la Dragonne, tout en lui gratouillant le cou. Vraiment, cette conversation me plaisait, même si on s'était un peu éloigner du sujet de départ, du but de notre expédition, le pourquoi et le comment des "Pierres de l'Etoile"

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Ma mère était harpiste. Elle chantait des ballades, louant certains Pernais, en égratignant d'autres. Elle m'avait appris à marcher droit et assumer chaque pas que je faisais dans la vie pour ne pas avoir à rougir ou baisser le regard face à qui que ce soit. Mon père, quant à lui, avait tempéré ces conseils d'assurance et de détermination par le rappel de l'importance de l'indifférence, soulignant que les médisants se lassaient face à l'absence de réaction. Je devais reconnaître que la combinaison de leurs techniques avait donné un résultat probant bien que mon envie de malgré tout prouver au monde qu'on me méjugeait souvent me brûlait les tripes ... jusqu'à ce que je passe à l'acte, et ainsi de suite. Enfin, « faites ce que je dis ... » ○ Etre soi-même ? Les gens sont-ils moins méchants si on ne les écoute pas ? J'en doute un peu ... ○ Ils finissent par se lasser, je pense, parce qu'ils voient que ça ne t'atteint pas. Quand on réagit, c'est qu'on est blessé, vexé. Il faut leur faire croire que ça ne nous atteint pas, mais, je le reconnais, c'est dur. ○ Souris-je, un de mes sourires un peu contrit me rappelant mes échecs en la matière. Rien de plus complexe que de jouer les impassibles quand on était touché en plein cœur. Et, par la Coquille, que les persifflages sur ma maladresse et mon incompétence ont pu faire mouche ! ○ Et puis, si on veut être un chef, un meneur, on doit faire attention à son image, on est mieux suivi par les gens qui nous respectent que par ceux qui se moquent de nous, non ? ○ Bah, j'suis pas une Dorée, moi, mais je peux te dire que les chefs mous, qui tiquent, s'énervent ou font un foin de la moindre remarque n'ont pas une image géniale. Il faut savoir ... écouter les critiques - les constructives, hein - et en prendre son parti. Pas remercier ceux qui vous crachent à la figure ... ○ Notais-je, reniflant de dédain à l'évocation des saletés qui avaient pu me mener la vie dure.

Je n'étais pas la bonne fifille qui laissait tout passer donc ma rancune parlait sans doute un peu pour moi. Il faut dire que je détestais me laisser faire et dire « oui » même quand je ne le pensais pas. Certains y arrivaient très bien, s'écrasant comme des blattes, mais moi ... non. J'avais mon caractère et j'estimais que des relations saines ne s'établissaient pas sur les mesquineries mais bien sur la franchise, l'échange, la confiance et les critiques intelligentes. En attendant, je n'écoutais pas les gens bavasser ... Vous me direz, je n'avais pas non plus spécialement envie de devenir meneuse d'hommes. Du moins pas au sens où Lÿonel semblait l'entendre. Et, de toute manière, en tant que Verte, je ne serais jamais à la tête d'un Weyr.

Dans tous les cas, ce garçon avait encore le temps de voir venir avant de devenir un meneur, sans jouer les rabats-joie. Il avait des choses à voir, à apprendre et la vie à croquer goulument, ce que les foires permettaient sans souci, d’autant plus quand on les passait « en famille ». ○ Oui ... une famille si grande qu'il doit parfois être difficile de s'entendre avec tout le monde, non ? ○ J'éclatai de rire. Il avait tellement raison. ○ Tu ne crois pas si bien dire. ○ Affirmais-je, accompagnant ma réponse d’un léger hochement de tête. ○ On s’y habitue et on apprend vite qui côtoyer en priorité et qui éviter pour ménager ses nerfs. ○ Soulignais-je non sans un sourire amusé. Oh oui, je puisais cette assertion dans mon p’tit vécu. J’avais rapidement capté qui était sain d’esprit et qui fourrait ses paroles d’un fiel si sûr, âcre et irritant qu’on aurait dit un insidieux poison. ○ Mais c'est vrai que j'aimerais bien entendre les chants et la musique, et voir les danses aussi. Moi, je ne sais ni jouer, ni chanter, ni danser, juste dessiner, je ne suis pas sur que ça serve dans les festivités. ○ Servir dans les festivités ? Hey, on n’est pas harpiste, nous, hein ! On suivra l’animation plus qu’on ne la fera. Si tu veux tout savoir, je suis incapable de danser correctement. Mais je suis convaincue que je suis l’exception qui confirme la règle selon laquelle tout le monde peut apprendre. Et puis pour les dessins … Bah, si tu représentes les scènes de danse, de chant ou autres, ça peut toujours être chouette, non ? Mais personne ne te demande de tenir un étal ou autre, donc … ○ Croquer serait juste pour le plaisir des yeux, quoi.

Pour ce qui était de l’épineux problème des Chutes, Lÿonel n’avait pas tort, ça me tarabustait depuis un bon moment et je n’aurais de cesse de tourner et retourner la question tant que je n’aurais pas mis le doigt sur une solution probante. ○ On est bien d'accord ... seulement, je crois que lorsque les fils tomberont, ils auront eux aussi bien d'autres wherries à fouetter que d'aller se promener à l'autre bout du continent, et préfèreront se cacher que d'aller risquer leur vie sur leurs bateaux sous une pluie plus brûlante que le feu... ○ J’eus un sourire plus large encore en voyant l’aplomb avec lequel Lÿonel annonçait sa réplique. Comme si moi, je n’en avais pas une ! C’était bien mal me connaître. UU ○ Hin hin … Mais tu crois vraiment qu’ils vont arrêter de pêcher pendant toute la durée du passage, toi ? J’ai peur qu’ils prennent une habitude, en fait. Et que, justement, quand les Fils ne tomberont pas mais que le passage ne sera pas fini, ils oublient qu’on aura autre chose à faire que pointeurs de poissons. Tu vois ce que je veux dire ? ○ Oui, je creusais jusqu’au bout et prenais d’office le parti inverse ou soulevais systématiquement un « mais » pour être absolument sûre qu’on opposait tous les arguments opposables, qu’on notait toutes les difficultés notables, bref, qu’on allait au fond des choses pour dégager la meilleure proposition possible.

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Sujet: Re: « Pern aux aguets surveille les cieux »