Un pinçon pour la pimbêche

Sujet: Un pinçon pour la pimbêche Sam 11 Déc - 12:04

Certains jours, les événements s’enchaînaient de telle manière qu’ils nous donnaient envie de retourner nous coucher, ou nous faisaient amèrement regretter de nous être levés le matin. Je ne m’étais pas levée du pied gauche, ce matin-là, mais mon pied droit avait rencontré une masse chaude et douce au lieu de se poser à plat sur la fourrure rêche qui me servait de descente de lit. Je n’avais pas eu le temps de m’appuyer de tout mon poids, mais la pression avait été assez forte pour réveiller en sursaut la descente de lit vivante, qui avait réveillé Maman et Nounou en aboyant comme un furieux. Ayant été plusieurs fois la cible du courroux de Maman, Emil n’avait pas demandé son reste et s’était enfui comme un voleur, la queue entre les pattes. Je n’avais pas tardé à le suivre, avec des chaussettes dépareillées, les bottines délacées, un pantalon, et une chemise si informe que je songeais à la jeter dès qu’elle rencontrait mon regard.

Mais ce n’était que le début. Aux cuisines, j’avais bousculé un Chef d’Escadrille qui s’était retrouvé avec une superbe tâche de klah, en forme d’étoile, sur sa tunique toute neuve. Une cuisinière s’était empressée de me cacher derrière un plateau plein, pour m’épargner les foudres de l’intéressé, et m’avait envoyée me cacher ailleurs ; si bien que je n’avais même pas eu droit à un quignon de pain pour mon petit-déjeuner. Yasmine n’était rien venu réclamer, mais Emil était venu gémir dans mes jambes pour avoir de quoi manger. Comme j’avais les mains vides, il était allé faire un sit-in devant les cuisines, jusqu’à ce qu’un marmiton bien remonté vienne m’ordonner de le faire bouger.

Sale journée, vraiment.

A l’Infirmerie, on m’avait demandé de refaire l’inventaire. C’était un travail effectué tous les mois, pour vérifier l’état des réserves et prévoir les futures sorties-cueillettes, pour les Aspirants et les Candidats, ou pour d’éventuelles commandes à l’Atelier des Guérisseurs, pour les produits les plus rares.

Emil s’était couché sous le bureau du guérisseur-en-chef, sans bouger une oreille, et m’observait travailler du coin de l’œil. Mon supérieur était parti pour une visite à domicile et les autres travailleurs de l’Infirmerie vaquaient à d’autres occupations, ailleurs ; en d’autres termes, j’étais seule, sans compter Emil. Mais alors que je comptais les bocaux d’herbe calmante, Emil leva soudain la tête et jappa. Je me retournais aussitôt, et me retrouvai face à l’Aspirante Dorée Loesha.

"Hmmm, je peux t’aider ?"

Sujet: Re: Un pinçon pour la pimbêche Mer 15 Déc - 1:27

Effectivement, certains jours, nous ferions mieux de ne pas nous lever et le pire dans l'histoire -en ce qui me concernait du moins- c'était qu'il n'y avait aucun préavis. En général, la journée commençait bien, très bien, trop bien, et empirait d'heure en heure, minute après minutes. Et aujourd'hui était un jour comme cela, sauf qu'évidemment, je n'en avais aucune idée lorsque j'ouvrais les yeux à l'aube, réveillée par le "doux" bruit des estomacs des différentes dragonnes criant famine. Non, sincèrement, ce n'était pas si terrible. Enfin, au bout de deux ans, ça ne l'était plus devrais-je plutôt dire... Pfff... Vivement que j'ai un Weyr personnel... Avec moi. Bien sûr INEEYTH, avec toi. J'ai faim. Je sais... Soupirai-je en m'étirant avant de m'extirper rapidement de sous les fourrures pour passer un vieux pantalon de toile, deux chemises chaudes, un gilet par dessus et une paire de bottes fourrées. J'attachais ensuite mes cheveux plus à l'aide d'un morceau de bois et me dirigeais vers mon imposante dorée en évitant soigneusement de croiser le reflet du miroir positionné sur mon chemin. Pas que je sois précieuse ni que je me laisse aller mais depuis mon arrivée au Weyr et ma rencontre avec INEEYTH ne m'avait guère laissé le temps de vraiment m'occuper de moi depuis deux révolutions. Du coup, histoire d'éviter la crise cardiaque en voyant à quoi je ressemblais aujourd'hui, je les évitais, tout simplement. Je suis en train de m'autodigérer... Ce mot n'existe pas... Mais FEYTH va manger avant moiiiiii.... couina-t-elle sur un ton plaintif tandis que j'accélérais le pas vers les cuisines pour récupérer le petit déjeuner de la dorée que j'avais préparé la veille au soir, grillant S'ras au passage UU Oui oui, il était trop poli, il laissait quasiment toujours passer les filles avant donc il me fallait lui faire plaisir, non ? Après tout, il était tout à mon honneur de le laisser étaler son éducation aux yeux de tous... Bref. La vue de la viande rouge avant le klah me souleva le cœur mais je tins bon et revenais vers INEEYTH les bras chargés d'un plat qu'elle mit quelques secondes à dévorer.

Je profitais de sa petite sieste pour me débarbouiller et prendre un mon tour me petit dej et entamais ma journée, semblable à toutes les autres depuis maintenant deux révolutions. Cours, vol, bain, huile, repas d'INEEYTH, sieste d'INEEYTH donc mon repas et un cours théorique pour les Dames Dorées, nouveau cours extérieur, nouveau bain et massage, nouveau repas d'INEEYTH et coupure au pouce, su-per. Loesha s'est fait mal ? Mais non, ce n'est rien. Mais si... Tu as mal !!! J'arquais un sourcil devant le regard maintenant jaune de ma dorée. Je te dis que ce n'est rien INEEYTH Mais mais mais mais mais mais... Je vais aller voir le guérisseur si tu préfères mais ce n'est rien de grave... Mais mais mais mais mais mais... Je tentais de la rassurer d'une caresse sur le museau de ma main "valide" et poussais encore un peu de viande devant elle avant de reculer. Je reviens vite. Si elle hésita un instant sur la marche à suivre, le regard envieux d'une Verte sur son plat de viande réveilla son estomac et elle continua de manger tandis que je m'éloignais d'un pas rapide.

Elle dormirait normalement quelques temps après avoir fini son repas, ce qui me laissait le temps de me faire soigner. Pas que j'en ai vraiment besoin, mais ma dorée, elle, ne pourrait pas se concentrer sur grand chose si elle voyait encore une goutte de sang m'appartenant.

Une fois devant le dispensaire, j'entrais tranquillement et cherchais un guérisseur des yeux sans oublier de filer une caresse au chien qui trainait souvent dans le coin. Oh, j'avais remarqué la blondinette en grande discussion avec ses bocaux mais si je pouvais voir quelqu'un d'autre, ça m'arrangeait... Sauf que ce n'était visiblement pas le bon jour pour cela. Je pinçais les lèvres et tournais la tête dans sa direction. Tiens, elle aussi paraissait ravie de me voir... Hmmm, je peux t’aider ? Hmmm, j'imagine que oui. répliquais-je exactement sur le même ton, ne voyant pas vraiment l'intêret du "hmmm" précédant sa question. Enfin... 'fallait pas chercher à comprendre j'imagine... Je retenais un regard vers le ciel et affichais un large sourire, un peu trop poli peut-être pour être réellement honnête. Je me suis coupée il y a quelques minutes, rien de bien grave mais INEEYTH ne le vit pas très bien donc... Si tu as de quoi faire un pansement, ça pourrait m'aider. Ce n'était pas une demande trop compliquée normalement, elle devrait pouvoir le faire sans attendre le retour des vrais guérisseurs n'est-ce pas ?

Sujet: Re: Un pinçon pour la pimbêche Mer 15 Déc - 14:40

Je n’avais rien contre Loesha, mais c’était encore mieux quand je ne l’avais pas dans les pattes. On ne se croisait pas souvent, de toutes manières, vu qu’elle passait plus de temps à se mirer dans les grands yeux à facettes de sa reine, aussi béate qu’une Candidate après l’Eclosion, qu’à fréquenter les Cavernes Inférieures. Nounou assurait que les dames dorées avaient du boulot par-dessus la tête, mais pour moi, c’était de la comédie. Sa Reine était presque adulte, et je me demandais franchement pourquoi sa maîtresse devait encore couper sa viande. Ineeyth avait des ailes, des griffes, des crocs, et elle savait s’en servir ; si j’avais été Maître des Aspirants, je me serais arrangée pour qu’on arrête de lui donner la becquée, depuis plusieurs semaines déjà. Si Loesha perdait tant de temps à débiter des carcasses en morceaux, c’était parce que le système était inefficace ; et la tête du système, c’était elle et ses comparses dorées. Donc, elle n’avait que ce qu’elle méritait.

CQFD.

Je me suis coupée il y a quelques minutes, rien de bien grave mais INEEYTH ne le vit pas très bien donc... Si tu as de quoi faire un pansement, ça pourrait m'aider.
"Grande créature, petite nature... Selon Maman, c’est pareil pour les hommes. Plus ils sont grands, baraqués et virils, plus ils sont douillets" commentai-je, très amusée.

J’étais presque heureuse que Yasmine soit une petite garce indépendante. Contrairement aux Reines dragons, elle avait commencé à voler à peine sortie de son Œuf, et fait ses débuts à la chasse, auprès des poussins de wherries et des serpents de tunnel, quelques semaines plus tard. Elle continuait à venir pour que je la baigne, l’huile et la nourrisse, mais je me demandais parfois si elle n’avait pas l’impression de m’accorder une faveur en me laissant ces soins : la vérité, c’était qu’elle pouvait très bien se passer de moi, contrairement à Emil qui n’était même pas fichu de défendre son os contre les lézards. Ledit Emil était resté sagement sous le bureau, les oreilles pointées en avant, la truffe frémissante. Sa queue battait doucement le sol derrière lui, mais il ne faisait pas mine de se lever pour saluer Loesha.

Je tirai une chaise pour l’Aspirante Dorée.

"Je t’en prie, assieds-toi, je vais m’occuper de ça"

Je fis quelques pas à droite et farfouillai dans un tiroir pour en tirer un bandage propre, du fil et une aiguille, au cas où des points de suture seraient nécessaire ; je me déplaçai ensuite en pas chassés, d’un mètre sur la gauche, pour prendre une décoction de racines rouges, désinfectantes, dans l’armoire.

"Comment tu t’es fait ça ?" demandai-je, en posant le matériel sur un tabouret, à proximité de Loesha.

Je pris une chaise pour moi et m’installai, avant de tendre la main pour que l’Aspirante Dorée me donne la sienne.

Sujet: Re: Un pinçon pour la pimbêche Mar 4 Jan - 0:35

Si Shin n'avait rien contre moi, je ne pouvais prétendre l'inverse. Effectivement, nous ne nous croisions guère et je ne m'en plaignais clairement pas maintenant, cela ne signifiait pas forcément que j'avais quoi que ce soit à lui reprocher si ce n'était son manque de politesse général et son incapacité à prendre des décisions. Car bon, le genre "je ne sais pas ce que je veux ni ou je vais ni pourquoi parce que la vie est trop compliquée", le tout accompagné de grands battements de cils adressés à qui voudrait bien la sauver, c'était bien gentil, mais personnellement, ça me saoulait vite. Certes, elle ne m'avait rien fait, mais mis à part lui foutre un coup de pieds au fesses pour lui remettre les idées en place, elle ne m'inspirait pas grand chose. Enfin, le Weyr était grand, il était donc relativement facile de s'ignorer en toute cordialité, ce qui me convenait totalement et qui semblait lui convenir au moins autant. Bien évidemment, il y avait des moments, comme aujourd'hui, ou s'ignorer était difficile, en conséquence, nous faisions chacune preuve de toute l'hypocrisie disponible et tentions de faire passer le temps le plus rapidement possible.

Je lui expliquais donc de manière concise ce qui m'amenait ici et me contentais de la regarder tandis qu'elle s'amusait à parler pour ne rien dire. Grande créature, petite nature... Selon Maman, c’est pareil pour les hommes. Plus ils sont grands, baraqués et virils, plus ils sont douillets. Certes. Citer maman était certainement la seule chose que la demoiselle savait faire. Je n'allais certainement pas lui demander de faire preuve d'originalité, ses deux neurones risqueraient de s'embrouiller et je n'avais guère envie de me retrouver avec un point de suture à la main droite au lieu de la gauche. Je passais donc en accentuant un peu plus mon sourire sans en penser moins pour autant.

J'avançais ensuite dans la pièce en m'étonnant de voir le chien planqué sous un bureau. En tant qu'ancienne éleveuse, j'avais plus l'habitude de voir ces animaux heureux et sociables plutôt que paranoïaques planqués sous un meuble mais bon, je savais aussi que le maître avait une influence sur l'animal donc au final, était-ce si étonnant ? Enfin, je laissais le chien là où il était -je n'avais pas envie de lui faire recevoir une raclée pour avoir été lui même et me dirigeais vers la chaise que Shin me présentait. Je t’en prie, assieds-toi, je vais m’occuper de ça. Merci bien. Oui 'fin bon, c'était son taff après tout hein... Je la laissais farfouiller dans ses affaires afin de trouver le matériel nécessaire et reportais mon attention sur elle tandis qu'elle reprenait la parole. Comment tu t’es fait ça ? Agression de couteau à la cuisine et accessoirement, deux mains gauches quand je veux faire un truc trop rapidement. répondis-je en haussant simplement les épaules. Non, je n'étais pas si maladroite que ça mais tout le monde se coupait de temps en temps et je n'étais pas bien différente du reste du monde, Dame Dorée ou non et contrairement à ce que semblait penser le reste du Weyr... Enfin, ce qu'ils pensent ne changeait pas grand chose pour moi en fin de compte. J'étais Dame Dragon et j'apprenais à faire mon job, comme tout apprenti dans un atelier -mis à part, évidemment, ceux qui ne savaient pas ce qu'ils voulaient- UU. Tout le monde est parti ? demandais-je en remarquant la seconde caverne tout aussi vide que celle que nous occupions, histoire de faire la conversation plus qu'autre chose car bon, j'avais beau ne pas apprécier la jeune femme qui me faisait face, ça ne m'empêchait pas d'être polie.

Alors, verdict ? Il va falloir couper ? Oui oui, j'étais ironique...

Sujet: Re: Un pinçon pour la pimbêche Mer 5 Jan - 14:26

Nounou ne comprenait pas pourquoi j’avais une dent contre les dames dorées, mais un seul sourire de Loesha aurait sans doute suffi à dissiper le malentendu. Il y avait rien de plus faux qu’un sourire adressé par une Aspirante dorée à ses subordonnées, comme une couche de mauvais vernis, prêt à se craqueler ou à se désagréger au moindre choc. Vraiment, ses congénères et elle avaient tout des bijoux en toc : une couche dorée à l’extérieur, du fer de mauvaise qualité à l’intérieur, toujours prêtes pour une parade, mais absentes dès que les tâches devenaient un peu trop physiques. Je rendis son sourire à Loesha puis m’éloignai pour préparer mes différents instruments. Je n’avais pas encore vu la blessure, mais c’était une question de secondes ; et j’étais assez expérimentée pour savoir quoi faire dès que j’aurais vu la coupure de près, bien en face. Je sautai volontairement l’étape baume calmant. Il serait toujours temps d’y revenir plus tard, si nécessaire.

Ou pas.

Agression de couteau à la cuisine et accessoirement, deux mains gauches quand je veux faire un truc trop rapidement.

Je ne fis aucun commentaire et me payai même le luxe de réprimer un sourire narquois. C’était bien pour ça que je ne bossais jamais en cuisines... Trop dangereux pour mes doigts d’or ! Je n'avais jamais entendu parler de la maladresse de Loesha, mais ça ne me surprenait pas tant que ça, au bout du compte. Ce n’était pas son aide au Weyr, ses talents artistiques, son intelligence supérieure ou son adresse qui faisaient tourner les têtes sur son passage. Ou tout du moins, pas à ma connaissance ; mais tout serait différent après la première ponte de sa dorée.

Je m’assis à côté de l’Aspirante et fis mentalement les comptes. Ineeyth allait sur ses deux révolutions, donc son Vol était pour bientôt. Je me demandai si Illian marquerait l’un de ses dragonnets.

Tout le monde est parti ?
"Oui, ils sont tous en vadrouille. Je sais que le chef est allé faire une visite à domicile, mais je ne sais pas où sont les autres. Y en a sûrement qui bossent, mais ça m’étonnerait pas que le nouveau soit allé faire glousser les cuisinières"

Je nettoyai la plaie de Loesha à l’eau, pour mieux la voir. Elle pissait le sang mais c’était souvent le cas pour des plaies superficielles, sans qu’elles soient graves pour autant. Je fus obligée de la nettoyer une deuxième fois pour être sûre de mon diagnostic.

Alors, verdict ? Il va falloir couper ?
"On ne va même pas faire de point de suture, c’est une petite coupure de rien du tout. Je vais faire un bandage un peu serré, elle va arrêter de saigner toute seule, et elle cicatrisera gentiment pendant la semaine"

Je songeai à ajouter qu’elle pourrait ensuite retourner s’amuser avec ses petits camarades, mais je préférai m’abstenir. Mine de rien, elle avait du mordant, et je n’avais aucune envie de me lancer dans une joute de ce genre avec elle.

Je trempai un bout de tissu dans la décoction de racines rouges et l’appliquai sur la plaie, sans préavis.

"Comment va Ineeyth ? Elle a arrêté de grandir, ou elle a décidé de continuer sur sa lancée ?" demandai-je gentiment.

Je gardai le tissu en contact avec la plaie peut-être un peu plus longtemps que nécessaire (ça picotait juste un peu, rien de bien méchant, la brave Loesha avait sûrement vu pire), puis m’attaquai au pansement.

Sujet: Re: Un pinçon pour la pimbêche Ven 14 Jan - 11:52

Hm... Je doutais sincèrement que "Nounou" en question remarque quoi que ce soit à mon sujet car en vérité, du moins il me semblait, je n'étais pas du genre à prendre tout le monde de haut. Shin, c'était différent. Elle me prenait de haut, je le lui rendais. Bon ok, même si elle ne l'avait pas fait à la base, je l'aurais fait quand même, elle m'agaçait, c'était plus fort que moi mais cela ne signifiait pas que je me comportais ainsi avec absolument tout le monde. En tout cas ce n'était pas mon intention. Mais bon, imaginer que la blondasse qui me faisait face se pense assez importante pour se considérer le centre du monde ne m'aurait pas tant étonnée que cela au final... Et quand on se considère ainsi, il est évident qu'il est assez difficile d'imaginer que quelqu'un puisse ne pas se comporter avec n'importe qui comme avec son petit nombril chéri à soi. Encore une fois, j'étais la pimbêche qui faisait des généralités, traitant tout le monde comme un cadavre de Wherrie moisi -Telar, Lilwen ou même Shoneah pourraient très certainement confirmer mon soucis de supériorité face aux vertes ou aux gens des cavernes, ce qui n'était pas DU TOUT le cas de miss perfection, qui elle, n'aurait jamais osé mettre toutes les Dorées dans le même panier pour le simple fait de jalouser le fait de n'avoir jamais réussi à accéder à ce grade. Non, ce n'était clairement pas le genre de la si gentille, ouverte d'esprit, pure et douce Shin qui ne pensait jamais à mal et ne jugeait jamais personne, n'est-ce pas ?

Enfin... Je ne considérais pas que ces gamineries requièrent une réelle attention de ma part donc je me contentais d'aller à l'essentiel en restant polie. Hypocrite moi ? Si peu. En tous cas, dans cet instant précis, je ne considérais pas l'être. J'étais polie, certes, mais Shin et moi savions très bien ce que nous avions en tête alors si on pouvait éviter de se chamailler comme des pupilles, ça pouvait être utile, mais cela ne voulait pas dire qu'il nous fallait être sincères dans nos sourires. Quoi qu'à la réflexion, nous l'étions totalement.

J'expliquais rapidement ce pourquoi j'étais ici en prenant place sur la chaise qu'elle m'avait indiquée et la laissais farfouiller dans le bric à brac des guérisseurs sans rien ajouter. Si elle était assez idiote pour ne pas comprendre ce que je disais, elle ajouterait maladroite à la longue liste de défauts qu'elle avait établie à mon égard et, en vérité, j'espérais bien gagner la compétition face aux autres dorées qu'elle ne devait pas plus supporter pour à peu près exactement les mêmes raisons. Le silence s'installant dans la pièce, je reprenais la parole pour m'enquérir des raisons de l'absence du reste du personnel du dispensaire. Oui, ils sont tous en vadrouille. Je sais que le chef est allé faire une visite à domicile, mais je ne sais pas où sont les autres. Y en a sûrement qui bossent, mais ça m’étonnerait pas que le nouveau soit allé faire glousser les cuisinières Je me contentais d'arquer un sourcil. Il y a un nouveau ? m'étonnais-je simplement, évitant de relever à haute voix le fait que ce n'était pas en passant son temps dans les cuisines à "faire glousser les cuisinières" qu'il progresserait dans son domaine... Je serrais aussi légèrement les dents au peu de douceur dont faisait preuve la demoiselle en ce qui concernait le nettoyage de ma plaie. Ok, je n'allais pas en mourir mais quand même, je n'avais jamais compris ce qui pouvait pousser les gens à faire du mal volontairement si ce n'était la stupidité. Quoi qu'avec Shin, la réponse était très certainement dans la question. Quoi qu'il en soit, si elle attendait de m'entendre chouiner pour gonfler son orgueil sadique, elle risquait d'attendre longtemps ! Oui, j'étais fille du Fort et Aspirante Dorée, mais j'avais jusqu'ici toujours travaillé avec les animaux et tout le monde savait que ces derniers étaient souvent un peu brutes, surtout quand ils avaient peur ou ne voulaient pas faire ce qu'on leur demandait.

Une fois son nettoyage terminé, je demandais ironiquement s'il fallait couper. On ne va même pas faire de point de suture, c’est une petite coupure de rien du tout. Je vais faire un bandage un peu serré, elle va arrêter de saigner toute seule, et elle cicatrisera gentiment pendant la semaine. Super ! Le temps que ça ne me bloquait pas, ça m'arrangeait. Bon, le bandage poserait problème avec les bains d'INEEYTH mais l'eau de mer ne faisait pas de mal à ce genre de coupures et je pourrais refaire mon bandage après.

Je serrais une nouvelle fois les dents tandis qu'elle appliquait le baume sur la plaie, sans aucune douceur pour changer. Décidément, je ne comprenais pas cette fille mais il était clair que si un jour je devais avoir des gamins, elle ne s'occuperait jamais de leurs soins. Comment va Ineeyth ? Elle a arrêté de grandir, ou elle a décidé de continuer sur sa lancée ? Elle va bien. J'rez considère qu'elle grandira encore un peu mais qu'elle n'atteindra pas la taille de sa mère pour autant. Ce qui ne me dérangeait pas. Elle avait atteint une taille tout à fait respectable pour sa nature et quand bien même cela n'aurait pas été le cas, ça n'aurait pas changé grand chose pour moi. INEEYTH était INEEYTH et ce n'était pas ce genre de détail qui aurait changé quoi que ce soit de mon point de vue mais bon, j'imaginais aisément que Shin trouverait plétore défauts à reprocher à ma dorée et sincèrement, je m'en fichais. Si elle n'avait rien de mieux à faire après tout, ça la regardait. Il parait que VEELENTH a pondu un œuf de dorée, bientôt une nouvelle aspirante dans le coin. C'était con hein ? UU

Sujet: Re: Un pinçon pour la pimbêche Dim 16 Jan - 14:16

Il y a un nouveau ?
"Oui, un jeune guérisseur de Nerat. Je ne lui ai pas beaucoup parlé, donc je ne connais pas les raisons exactes de son transfert mais je crois qu’il a été... séduit par l’hospitalité du Weyr"

J’agrémentai cette déclaration d’un petit sourire amusé et grivois. Je n’étais pas aussi innocente que j’en avais l’air, loin de là, et voir les tentatives pathétiques de l’intéressé pour m’attirer dans ses fourrures m’avait beaucoup amusée. J’avais feint de ne pas comprendre, avec un certain succès, et lui avait témoigné une indifférence bien réelle ; autant j’étais intéressée par les techniques qu’il avait apprises à Nerat, autant savoir ce qu’il savait faire au lit était très loin sur la liste de mes priorités. Il avait déjà fait ami-amie, et plus si affinités, avec plusieurs dames vertes, et semblait bien décidé à jouer le bourreau des cœurs dans les Cavernes Inférieures.

Je me demandai si c’était vraiment la peine d’étaler du baume sur sa coupure. C’était techniquement le genre de blessures qu’on soignait avec un bisou magique et un joli pansement, et non le type de plaie qui mettait les guérisseurs sur le pied de guerre ; comme j’estimais en avoir assez fait avec la décoction piquante, j’allai chercher une noix de baume et l’étalai soigneusement sur le doigt de Loesha, avec autant de soin que s’il s’était agi de n’importe qui d’autre. Enfin, je préparais la bande pour le pansement, grâce à quelques coups de ciseaux, et m’attelai à la tâche.

Je posai quelques questions sur Ineeyth, d’une part parce que ça m’intéressait, d’autre part pour être aimable. J’avais fréquenté bien assez de chevaliers au cours des seize révolutions écoulées pour savoir qu’ils adoraient disserter sur leur âme-sœur, en s’extasiant sur leur croissance, la dernière verte qu’ils avaient choppé ou la belle nuance de leur cuir après quelques bains d’eau, de sable et d’huile.

Elle va bien. J'rez considère qu'elle grandira encore un peu mais qu'elle n'atteindra pas la taille de sa mère pour autant.
"Tant mieux, ce sera moins long à sabler" déclarai-je.

Je tirai légèrement la langue tandis que je terminai le pansement, comme toujours quand j’étais particulièrement concentrée, en particulier sur une tâche réclamant une certaine précision.

Il parait que VEELENTH a pondu un œuf de dorée, bientôt une nouvelle aspirante dans le coin.

Je souris immédiatement, enchantée.

"Je sais, je l’ai vu"

Quand je disais ça devant certains chevaliers collets-montés, je me délectais de leur expression indignée. Je n’étais pas Candidate, je n’avais techniquement pas le droit de voir, d’approcher et de toucher les œufs, mais je m’en moquais bien... Qu’est-ce qu’ils pouvaient me faire, hein ? Me retirer mes nœuds de Candidate ? Je n’en avais pas ! Me sucrer mes nœuds d’apprentie guérisseuse ? Non plus ! M’interdire d’aider à l’Infirmerie ? C’était eux qui seraient ennuyés par cette mesure, pas moi... Me virer du Weyr ? Ils devraient d’abord passer sur le corps de Maman, et accessoirement celui de plusieurs de mes amis, à commencer par Telar. Quant aux corvées diverses qui égayaient la vie du Weyr, je les prenais toujours du bon pied. Ce n’était pas une torture de faire ce qui devait être fait, et ça ne m’empêchait pas de rêvasser ou de m’amuser.

"J’ai hâte de voir l’Eclosion, les paris vont déjà bon train dans les Cavernes. J’ai quelques favorites, je me demande si elles vont réussir à tirer leur épingle du jeu. Je sens qu’il va y avoir du sport ! Quand Varanth a brisé son œuf, elle a déchaîné les passions, je sais de source sûre que deux Candidates se sont écharpées dans les Dortoirs juste avant le début de la cérémonie. On a de chouettes Candidates pour l’Œuf d’Or, l’Eclosion vaudra le déplacement !"

Je terminai rapidement le bandage de Loesha et me frottai les mains, très excitée. C’était paradoxal, mais je vivais les Eclosions beaucoup plus intensément depuis que je les suivais depuis les gradins, et non sur les Sables. J’espérais quand même que Maman n’allait pas trouver un stratagème pour me poser sur les Sables contre mon gré, en l’honneur de l’Œuf de Reine – elle m’avait toujours vu avec une dorée, à part au moment où elle m’avait cru lesbienne.

"J’ai repéré également quelques Candidats qui pourraient avoir des bronze, faudrait que je fasse ma petite liste" continuai-je, d’humeur très joyeuse.

Je me levai.

"Enfin, bref, j’ai terminé. Autre chose ?"

Sujet: Re: Un pinçon pour la pimbêche Ven 21 Jan - 13:23

Relativement tranquillement installée sur ma chaise, je laissais Shin s'occuper de ma blessure en m'étonnant de l'arrivée d'un nouveau guérisseur. Oui, un jeune guérisseur de Nerat. Je ne lui ai pas beaucoup parlé, donc je ne connais pas les raisons exactes de son transfert mais je crois qu’il a été... séduit par l’hospitalité du Weyr De Nerat... ? Tiens donc, je n'en avais pas entendu parler... Il faut dire que les choses allaient et venaient par ici sans que tout le monde puisse suivre le moindre détail de ces changement. Iera mise à part certainement en ce qui concernait les gens des Cavernes, et Keldra pour les Chevaliers... Évidemment, la petite blonde qui me faisait face me reprocherait certainement une nouvelle fois mon ignorance en allant colporter différentes rumeurs mais cela ne me touchait guère. Je n'avais pas le temps de m'occuper de tout cela pour le moment et son point de vue sur la question ne m'intéressait pas vraiment. Espérons qu'il s'adapte, les guérisseurs sont loin d'être trop dans le coin, essentiellement quand les chutes commenceront... Ce qui ne devrait plus tarder si on en croyait les signes que les harpistes réussissaient à traduire...

Concernant ma blessure, si je m'étais déplacée jusqu'ici, c'était tout de même qu'il y avait un minimum à faire. S'il m'avait suffit de la lécher pour éviter les soucis avec INEEYTH, je l'aurai fait. En tant qu'ancienne éleveuse, je n'étais pas douillette et même si cela déplaisait à Shin, je n'allais pas le devenir pour lui faire plaisir parce que mademoiselle l'avait décidé.

Je la laissais cependant exercer son "travail" -car vu qu'elle n'était pas partie pour être guérisseuse, c'était plus un hobbie qu'autre chose- en continuant la conversation qui déviait maintenant sur les mensurations de ma jolie dorée. Tant mieux, ce sera moins long à sabler. Ah ça ! C'est pas peut-être. Et tant mieux d'ailleurs même si avec cette taille, je doute qu'un mètre ou deux soit réellement significatif... Ou peut-être mais sincèrement, je n'avais pas envie de vérifier cette vérité donc sa taille actuelle était très bien. UU

Je continuais sur la ponte de VEELENTH et son œuf de dorée et arquais un sourcil à la réflexion de Shin. Je sais, je l’ai vu. Tu l'as vu ? m'étonnais-je visiblement, ayant toujours entendu dire qu'il était interdit pour les non-chevaliers de s'approcher des œufs... Partant du fait que les lois n'étaient pas faites pour rien, évidemment, cela m'étonnait et me ramenait forcément quelques années en arrière, lorsque j'étais persuadée que les gens du Weyr, qu'ils soient ou non Chevaliers, n'étaient intéressés que par leur bon plaisir et considéraient que les lois ne les concernaient pas. Hm... Shin était tout à fait le genre de personnages qui faisaient que les gens du Fort détestaient ceux du Weyr et dans ce cas, je ne pouvais pas les en blâmer... Mes félicitations ! Tu dois être tellement fière d'être au dessus des obligations régissant le reste du monde... soupirais-je avec une admiration totalement feinte. N'avait-elle donc rien de mieux à foutre ? Ah non... Vu qu'elle ne faisait rien de sa vie, forcément...

J’ai hâte de voir l’Eclosion, les paris vont déjà bon train dans les Cavernes. J’ai quelques favorites, je me demande si elles vont réussir à tirer leur épingle du jeu. Je sens qu’il va y avoir du sport ! Quand Varanth a brisé son œuf, elle a déchaîné les passions, je sais de source sûre que deux Candidates se sont écharpées dans les Dortoirs juste avant le début de la cérémonie. On a de chouettes Candidates pour l’Œuf d’Or, l’Eclosion vaudra le déplacement ! Elle n'avait pas un soucis avec les dorées y'a pas trois minutes ? Maintenant elle avait des favorites ? Elle changeait d'idée toutes les trois secondes ou pas ? A moins que ça ne soit pas avec les dorées qu'elle ait un soucis mais juste avec moi. Possible aussi... Mais peu importe. Je n'aimais pas les gens qui se prenaient pour le nombril du monde, ce n'était pas nouveau. Je ne répondais par conséquent pas à son monologue concernant super VARANTH et les fantastiques Candidates dorées qu'elle semblait avoir trouvées toute seule depuis le fond de sa caverne et la laissait terminer mon pansement. J’ai repéré également quelques Candidats qui pourraient avoir des bronze, faudrait que je fasse ma petite liste. Certes. Si vraiment elle n'avait rien de mieux à faire... Enfin, bref, j’ai terminé. Autre chose ? Non, ça ira. Merci bien. Répondis-je tout à fait poliment en me relevant avant de prendre congé. Bon courage pour la fin de la journée, Shin. J'accompagnais mes paroles d'un simple sourire et quittais la pièce, blasée par ce que je venais d'entendre et bien décidée à me renseigner un peu plus sur le sujet concernant les coutumes et lois du Weyr...

Sujet: Re: Un pinçon pour la pimbêche Sam 22 Jan - 17:58

Espérons qu'il s'adapte, les guérisseurs sont loin d'être trop dans le coin, essentiellement quand les chutes commenceront...
"Il est déjà bien intégré à l’équipe, je ne me fais aucun souci pour lui. Il a l’air d’adorer Ista. A mon avis, il ne retournera pas à Nerat de sitôt"

Je ne fis aucun commentaire sur les Chutes à venir, parce que je ne savais pas tellement quoi en penser. J’étais prête à parier que les Harpistes avaient servi le même discours aux gens du Weyr et aux chevaliers-dragons deux siècles avant notre ère ; et tous les Weyrs avaient attendu l’arrivée des Fils, sur le qui-vive, en vain. L’Etoile Rouge était de plus en plus sanglante dans nos cieux, et les Reines faisaient des pontes régulières et abondantes, comme toujours à l’approche d’un Passage, mais peut-être que les choses avaient pris la même tournure la dernière fois... pour rien. Il était probable que les Fils reviendraient un jour, mais pourquoi maintenant ? Tout était calme, et ils avaient déjà raté leur retour une fois, pourquoi pas deux ?

Je me consacrai à la blessure de Loesha, désinfectant, pommadant, bandant le tout sans trop y réfléchir. C’était tellement courant, ce genre de soin, que les gestes devenaient automatiques. J’étais bien plus concentrée quand je devais faire un massage ou remettre des os en place – mon activité préférée à l’Infirmerie, juste avant le diagnostic. Ce qui me rappelait que mon mentor voulait me coller un ou deux accouchements, pour voir si je pouvais aider efficacement en tant que sage-femme ; comme je n’avais peur ni de la douleur, ni du sang, je pouvais effectivement m’en tirer, mais je ne savais pas si j’apprécierais l’expérience. Il n’y avait qu’un moyen de le savoir.

Quand vint le moment de parler de l’Eclosion, je laissai parler mon enthousiasme. J’étais toujours excitée par ces cérémonies, et le fait qu’elle soit de plus en plus nombreuses ne me déplaisait pas. J’adressai un grand sourire à Loesha quand elle fit vibrer la corde de l’ironie. Oui, j’étais très contente d’avoir pu aller voir les œufs en cachette, sans l’autorisation de personne. Si elle était arrivée au Weyr bien avant l’Eclosion, et non pas juste à temps pour conférer l’Empreinte à sa Reine, elle l’aurait sans doute fait aussi, même si cette idée semblait heurter sa sensibilité de sainte-nitouche. Braver les interdits faisait intégralement partie de la vie du Candidat moyen. Un chevalier sans audace, ce n’était pas un chevalier. Je connaissais plusieurs Candidats, et Candidates, qui n’hésitaient pas à aller chauffer les fourrures des dames et des chevaliers en dépit des interdictions, et j’étais sûre à cent pour cent que je n’étais pas la seule à rendre discrètement visite à la couvée.

Quand ma patiente se leva pour partir, je ne la retins pas. Je savais que sa politesse n’était qu’une mauvais façade, mais j’étais de trop bonne humeur pour m’en soucier.

"Bon courage à toi aussi !"

Je rangeai le matériel inutilisé et allai me laver les mains. Et une bonne chose de faite, une !

Sujet: Re: Un pinçon pour la pimbêche